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ACTION COMMUNISTE

 

Nous sommes un mouvement communiste au sens marxiste du terme. Avec ce que cela implique en matière de positions de classe et d'exigences de démocratie vraie. Nous nous inscrivons donc dans les luttes anti-capitalistes et relayons les idées dont elles sont porteuses. Ainsi, nous n'acceptons pas les combinaisont politiciennes venues d'en-haut. Et, très favorables aux coopérations internationales, nous nous opposons résolument à toute constitution européenne.

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Humeur

Chaque semaine, AC attribue un "roquet d'or" à un journaliste qui n'aura pas honoré son métier, que ce soit par sa complaisance politique envers les forces de l'argent, son agressivité corporatiste, son inculture, ou sa bêtise, ou les quatre à la fois.

Cette semaine, sur le conseil avisé de la section bruxelloise d'Action communiste, le Roquet d'Or est attribué  à Thierry Steiner pour la vulgarité insultante de son commentaire sur les réductions d'effectifs chez Renault : "Renault fait la vidange"...  (lors du 7-10 du 25 juillet).


Vos avis et propositions de nominations sont les bienvenus, tant la tâche est immense... [Toujours préciser la date, le titre de l'émission et le nom du lauréat éventuel].

 

 
5 mars 2014 3 05 /03 /mars /2014 13:31

Les irresponsables du pacte de responsabilité

Les entreprises ne créent pas l’emploi
par Frédéric Lordon, lu sur le blog  "La Pompe à phynance".

Il faut avoir sérieusement forcé sur les boissons fermentées, et se trouver victime de leur propension à faire paraître toutes les routes sinueuses, pour voir, comme s’y emploie le commentariat quasi-unanime, un tournant néolibéral dans les annonces récentes de François Hollande [1]. Sans porter trop hauts les standards de la sobriété, la vérité appelle plutôt une de ces formulations dont Jean-Pierre Raffarin nous avait enchantés en son temps : la route est droite et la pente est forte — mais très descendante (et les freins viennent de lâcher).

Entreprise, mon amour ? Retour à la table des matières

En effet, droit, c’est droit ! Et depuis l’origine. Evidemment, pour s’en apercevoir, il aurait fallu prêter un peu plus attention aux six premiers mois de la présidence Hollande, où tout a été posé pour cinq ans, et les actes et la logique des actes.

Ce texte est la version longue de l’article paru dans Le Monde diplomatique de mars 2014. Les actes d’abord, en une séquence impressionnante de cohérence : ambassade du premier ministre à l’université du MEDEF, reculade devant les « pigeons », rapport Gallois, consécration législative de l’ANI (Accord National Interprofessionnel) — et tout le reste à l’avenant : Jérôme Cahuzac qui n’a « jamais cru à la lutte des classes » [2], heureusement remplacé par Bernard Cazeneuve qui voit, lui, distinctement que « les entreprises ne sont pas des lieux d’exploitation ou d’accumulation de profit » [3], l’un puis l’autre sous la tutelle éclairée de Pierre Moscovici qui pense que « pour lutter contre l’exil fiscal, il faut avant tout valoriser le site France qui doit être accueillant pour les entreprises, les talents » [4], qu’il ne doit pas y avoir de loi sur les rémunérations patronales, matière en laquelle il faut préférer « agir dans le dialogue (...) et miser sur une autorégulation exigeante » [5], qui pense tellement de choses d’ailleurs... Essentiellement résumable à une : « les entreprises sont au cœur de notre politique économique » [6].

Et voilà énoncée la logique des actes. Pauvre logique qui transpire les stratégies du désespoir et de la renonciation. Car les tendances longues de la trahison idéologique se mêlent ici aux calculs égarés de la panique quand, ayant abandonné toute idée de réorienter les désastreuses politiques européennes, ayant même fait le choix de les durcir un peu plus avec le TSCG, et par conséquent privé de toute possibilité de relance, il ne reste plus pour se sauver du naufrage complet que le radeau de la Méduse : « l’entreprise » comme ultime providence, c’est-à-dire... le MEDEF comme planche de salut. Formidable effort de la vie sauve et géniale trouvaille au bord de l’engloutissement : « La seule chose qu’on n’a pas essayé, c’est de faire confiance aux entreprises » [7]. Ah ! la riche idée : faire confiance aux entreprises... Faire confiance au preneur d’otages en se jetant dans ses bras, persuadé sans doute que l’amour appelle invinciblement l’amour — et désarme les demandes de rançon.

La prise d’otages du capital Retour à la table des matières

Contrairement à ce qu’exclamerait dans un unisson d’horloges synchronisées la cohorte éditorialiste, scandalisée qu’on puisse parler de « prise d’otages », il n’y a pas une once d’outrance dans le mot, dont il faut même soutenir qu’il est analytiquement dosé au plus juste. Il est vrai que l’altération perceptive qui fait voir les droites sous l’espèce de la courbure est en accord avec cette autre distorsion qui conduit à voir des « prises d’otages » partout — chez les cheminots, les postiers, les éboueurs, et plus généralement tous ceux qui se défendent comme ils peuvent des agressions répétées dont ils sont l’objet —, sauf où il y en a vraiment. Il est vrai également que le capital a pour lui tous les privilèges de la lettre volée d’Edgar Poe [8], et que sa prise d’otages, évidente, énorme, est devenue invisible à force d’évidence et d’énormité. Mais par un effet de cécité qui en dit long sur le pouvoir des idées dominantes, pouvoir de faire voir le monde à leur manière, en imposant leur forme au réel, et en rendant invisible tout ce qui pourrait les contredire, par cet effet de cécité, donc, la plus massive des prises d’otages est devenue la moins remarquée, la plus entrée dans les mœurs.

Or, comme Marx l’avait remarqué, le capitalisme, c’est-à-dire le salariat, est une prise d’otage de la vie même ! Dans une économie monétaire à travail divisé, nulle autre possibilité de reproduire la vie matérielle que d’en passer par l’argent du salaire... c’est-à-dire l’obéissance à l’employeur. Et s’il n’y avait eu la conquête de haute lutte des institutions de la protection sociale, on ne voit pas bien ce qui séparerait la logique profonde de la mise au travail capitaliste d’un pur et simple « marche ou crève ».

Le capital ne prend pas en otage que la vie des individus séparément, mais également — en fait d’un seul et même tenant — leur vie collective, celle-là même dont la politique est l’expression, et qui donne normalement à la politique son objet. Mais voilà, l’objet de la politique est dans les pattes d’un autre : le capital. Cette captation a pour principe majeur que toute la reproduction matérielle, individuelle et collective, est désormais entrée sous la logique de l’accumulation du capital : la production des biens et des services qui reproduisent la vie matérielle n’est plus effectuée que par des entités économiques déclarées capitalistes et bien décidées à n’opérer que sous la logique de la marchandisation profitable. Et pour principe mineur la capacité d’initiative dont jouit le capital : le capital financier a l’initiative des avances monétaires qui financent les initiatives de dépenses du capital industriel — dépenses d’investissement ou dépenses de recrutement. Aussi les décisions globales du capital déterminent-elles le niveau général de la conjoncture, c’est-à-dire les conditions dans lesquelles les individus trouvent les moyens — salariaux — de leur reproduction. C’est ce pouvoir de l’initiative, pouvoir d’impulsion du cycle de la production, qui confère au capital une place stratégique dans la structure sociale d’ensemble — la place du preneur d’otages, puisque tout le reste de la société n’en finit pas d’être suspendu aux décrets du capital et à son bon vouloir.

Sous la menace de la grève de l’investissement Retour à la table des matières

Sans doute l’intensité de la prise d’otages se trouve-t-elle modulée par la configuration historique concrète du capitalisme au moment considéré. Le rapport de force entre le capital et le travail, on pourrait même dire entre le capital et tout le reste de la société, n’est pas le même lorsque le commerce international, les investissements directs et les mouvements de capitaux sont très régulés, et lorsqu’ils ne le sont pas. C’est d’ailleurs le propre du néolibéralisme que d’avoir accru quasiment sans limite les possibilités stratégiques du capital, en abattant systématiquement les barrières qui jusqu’ici retenaient ses calculs.

Il fallait donc avoir l’humanisme chrétien, ou la bêtise crasse, chevillée au corps pour s’imaginer que le capital pourrait, comme toute puissance en marche, ne pas pousser son avantage jusqu’à sa dernière extrémité, et pour croire qu’il trouverait de lui-même les voies de la décence ou de l’autorégulation. Or cette « dernière extrémité », très exactement appuyée à la capacité d’initiative qu’on vient de décrire, consiste en ce que le capital est en mesure d’exiger de la société qu’il soit fait droit à toutes ses demandes pour que l’initiative soit effectivement lancée. Faute de quoi il pratiquera la grève de l’investissement — « grève », n’est-ce pas là le mot qui, dans la boîte à deux neurones de l’éditorialiste quelconque, déclenche habituellement l’association avec « prise d’otages » ?

Bien sûr pour qu’il y ait arc électrique dans cette boîte-là, il faudrait que cette grève, d’un genre spécial, se donne à voir sous des formes plus standard. Or ni piquet, ni banderole, ni brasero dans les grèves du capital, mais plutôt une retenue silencieuse — de l’investissement —, accompagnée d’un lamento bruyant, lamento de la création empêchée, à base d’énergies qui voudraient tant être libérées (et qui sont tant bridées), d’étouffement règlementaire et de strangulations fiscales, ou plus subtilement d’attractivité du territoire (médiocre) et par conséquent de fuite des talents, bref le discours du positif contrarié — pour ainsi dire le discours des forces de la vie, que seule une perversité mortifère peut avoir l’idée de retenir.

Evidemment le discours du positif a le gros bâton du négatif sous la main. Car si la société n’exécute pas les quatre volontés du capital, le capital a les moyens de le faire sentir à la société — et ceci du fait même qu’il a capté la maîtrise entière de sa reproduction matérielle. Il faut alors prendre un peu de recul pour mieux mesurer l’ampleur de la prise d’otages, et l’efficacité du rançonnement, depuis la suppression de l’autorisation administrative de licenciement au milieu des années 80 jusqu’aux dispositions scélérates de l’ANI, en passant par la baisse de l’impôt sur les sociétés, la défiscalisation des stock-options, les atteintes multiples au CDI, le travail du dimanche, etc., liste interminable de butins de guerre, dont il faut comprendre qu’elle est vouée à s’allonger indéfiniment tant qu’il ne se trouvera pas en face de la puissance du capital une puissance de même échelle mais de sens opposé pour le ramener autoritairement à la modération, car, la liste précédente l’atteste suffisamment, le capital n’a aucun sens de l’abus.

Le capital-enfant Retour à la table des matières

Intensifiée comme jamais par la configuration institutionnelle du néolibéralisme, la capture — la prise d’otages — constitutionnelle au capitalisme a porté le rançonnement de la société entière à des degrés inouïs, mesurables par l’impudence déboutonnée de ses ultimatums. Le capital ne négocie plus avec la société : il extorque. Pourquoi se gênerait-il ? Sous le nom de « mondialisation », la situation structurelle a été aménagée pour maximiser son pouvoir matériel et symbolique, et il est dans la (tauto)logique des choses qu’une puissance à laquelle a été ôtée toute limite ne connaisse plus de limite. C’est pourquoi le capital désormais dicte ses demandes — on prétend que le pacte de responsabilité a été livré à Hollande clé en mains par Gattaz qui s’en défend à peine —, à défaut de quoi, il bloquera tout.

La compréhension de ce blocage demande alors de sortir de l’abstraction macroscopique du « capital » pour se transporter dans les psychés patronales ordinaires, et y observer in situ moins le cynisme ouvert de l’institution MEDEF que le sentiment du « bon droit » des patrons individuels, sentiment d’une évidente légitimité, ou bien celui d’une véritable offense au moindre refus, et la réaction totalement infantile du « si c’est comme ça... » qui s’en suit invariablement — « si c’est comme ça, je m’en vais », « si c’est comme ça la France n’aura plus mon talent », « si c’est comme ça, je paye mes impôts ailleurs », « si c’est comme ça, mon énergie n’est plus du tout libérée », « si c’est comme ça, je ne peux pas innover », « si c’est comme ça, je n’embaucherai pas ».

L’hypothèse infantile est décidément la bonne puisque la perte des limites fait invariablement remonter la part de l’enfant-tyran. A l’image de la psychologisation générale de la société, une des tendances les plus profondes du néolibéralisme, le débat politique se trouve donc entraîné dans une effarante régression où ne comptent plus que les conditions du confort psychique de l’enfant-patron. Pierre Gattaz réclame qu’on lui évite toute disposition « stressante ». Mais c’est sans doute Fleur Pellerin qui va le plus loin dans la grammaire du dorlotement en reconnaissant bien volontiers que « le milieu entrepreneurial a encore besoin de preuves d’amour » [9]. Voilà donc où nous en sommes : pour obtenir des patrons qu’ils daignent faire leur travail, la société doit leur témoigner de « l’amour », et surtout veiller à leur éviter toute contrariété. Stade ultime de la prise d’otages, où le preneur d’otages, en plus de la rançon, réclame d’être aimé, l’extorsion matérielle cherchant à se prolonger sous une forme délirante en extorsion affective.

Et c’est avec ce genre de complexion que la Droite Complexée du président Hollande imagine passer un pacte de responsabilité ! idée folle conduisant inévitablement à se demander lequel des deux « contractants » est le plus irresponsable, le capital-enfant qui ne connaît plus aucun frein et violentera jusqu’au bout la société otage, ou le gouvernement qui persiste, contre toute évidence, à en faire un partenaire « responsable ». Il faut en tout cas avoir au choix la franche bêtise ou, plus probablement, le cynisme retourneur de veste de M. Montebourg pour oser dire que le pacte consiste en « une réconciliation de la nation autour de l’entreprise », en contrepartie de laquelle il est attendu que « l’entreprise secoure la nation » [10].

La curieuse science expérimentale des baisses de cotisations Retour à la table des matières

Supposé qu’il passe parfois dans quelque esprit gouvernemental l’ombre d’un doute, le capital, lui, ne se pose pas ce genre de question. Tout à sa poursuite des coudées larges et de la suppression fiscale, il demande, menace... et obtient. Bref il commande. De toutes ses revendications, la plus constamment réaffirmée a pour objet les cotisations sociales — les « charges » — et le voilà de nouveau satisfait. Mais d’une satisfaction qui va s’usant — avec la force de l’habitude — et réclame sans cesse des montants plus importants pour se soutenir. C’est pourquoi — assez d’être timoré ! — Pierre Gattaz se propose toutes les audaces de l’arrondi supérieur : 100 milliards de réduc’, c’est beau, c’est net, pas compliqué à retenir, maintenant, donc, il nous faut 100 milliards. Double effet caractéristique de l’addiction et de l’accoutumance, le capital déclare qu’il ne peut plus vivre, et donc qu’on ne pourra pas compter sur lui, s’il n’a pas sa dose. Le fait est que depuis presque trois décennies de pratique intensive des baisses de cotisations sociales, sans compter les aides variées à l’emploi et les allègements de toutes sortes — Gérard Filoche en estime le total à 65 milliards d’euros [11], soit 3 bons points de PIB tout de même —, le capital n’a même plus à chercher la seringue : il a le cathéter branché à demeure.

Mais le vrai mystère dans toute cette affaire réside bien dans le fait même de politiques entretenues depuis si longtemps alors que leur inefficacité est si continûment avérée — elle, pour des raisons qui n’ont rien de mystérieux : parce que le coût salarial complet n’est qu’une fraction relativement modeste du coût total (25 %) [12] et que même les 100 milliards de Gattaz n’aboutiraient qu’à une baisse du coût de production de 3,5 % [13], une misère à la merci du moindre renchérissement de matière première, pour ne rien dire d’un mouvement de change d’un compétiteur extra-européen. A ce propos, et dans le registre du passeur de plats, signalons le commentaire tout de bienveillance de Daniel Cohen pour qui il ne faut voir dans le pacte de responsabilité « aucune conversion idéologique » [14] mais une simple « option pratique », le pacte consistant, « privé de l’arme monétaire, (...) à gagner en compétitivité (...) par une dévaluation fiscale ». Ceci, d’ailleurs, avant de suggérer « d’indexer [les prestations] des systèmes sociaux sur la croissance », soit la proposition même du MEDEF, et cette remarquable convergence du patronat, de la Droite Complexée et de ses économistes de service ne peut en effet être mise au compte d’aucune « conversion idéologique » — à l’évidence, l’unanimité spontanée des raisonnables.

Mais que dire également de l’imitation de tous les pays européens dans la course à la baisse du coût du travail, sinon qu’elle n’a pas d’autre effet que l’attrition générale des standards sociaux sans le moindre gain de compétitivité puisque celle-ci n’est jamais qu’un avantage différentiel, comme tel annulé par son adoption généralisée. Ou encore de la théorie dite du wage-gap, soutenant que le chômage est un effet de déséquilibre de l’offre et de la demande sur le marché du travail dû à un excès du prix du travail, sinon qu’elle est fausse et archi-fausse [15].

Mais aucune de ces évidences n’a la moindre prise, ni sur le patronat évidemment — il ne faut pas trop demander —, ni sur le commentariat qui jacasse la baisse des charges à l’unisson du MEDEF, ni surtout sur le gouvernement socialiste à qui pourtant ces conneries coûtent les yeux de la tête ! Le voilà alors le vrai pouvoir des idées dominantes : le pouvoir de se maintenir envers et contre tout, contre toutes les objections de l’analyse et contre toutes les infirmations du réel — et il n’en a pas manqué depuis plus de vingt ans de baisses continues de tout et de stagnation prolongée dans le chômage de masse. Le pouvoir des idées dominantes, c’est ce privilège des épistémologies asymétriques, c’est-à-dire d’un rapport totalement distordu à l’expérience : on poursuivra pendant des décennies, et jusqu’au bout, la mise en œuvre du faux que l’on continuera, contre toute évidence, de déclarer le vrai, là où on ne laisserait pas six mois à une tentative authentiquement alternative.

Car il faut s’efforcer d’imaginer un programme de rupture avec le néolibéralisme et surtout se figurer ce que serait la réaction du commentariat aux turbulences qui suivraient nécessairement d’une refonte de l’ordre institutionnel du capitalisme (encore ne parle-t-on même pas ici de sortie du capitalisme...) : glapissements et hauts cris, rappels à l’ordre de la « raison économique », avertissements que ça ne marche pas et que ça ne marchera jamais, injonction à faire une démonstration immédiate d’efficacité, quand le néolibéralisme ne cesse, lui, de nous appeler à la sagesse du long terme (où « s’obtiennent vraiment ses effets »), et de nous renvoyer à la patience, patience des efforts de compétitivité qui « finiront par payer », patience de l’Europe qui sera bientôt sociale, enfin plus tard... — il faudra, donc, se souvenir de cette asymétrie des exigences temporelles, qui somme les uns au court terme et accorde aux autres le long, le très long terme, pour ne pas oublier, si jamais vient un jour le moment de la transformation sociale, de préciser que nous demanderons nous aussi vingt ans et pas une journée de moins.

Les entreprises ne créent pas l’emploi Retour à la table des matières

Mais le pire dans toute cette affaire c’est peut-être l’irrémédiable inanité de la stratégie Hollande et de ses conseillers, esprits entièrement colonisés par la vue MEDEF du monde et qui n’ont d’autre point de départ de toutes leurs réflexions que la prémisse, l’énoncé princeps du néolibéralisme, il est vrai répété partout, entré dans toutes les têtes sur le mode de l’évidence au-delà de toute question : « ce sont les entreprises qui créent l’emploi ». Cet énoncé, le point névralgique du néolibéralisme, c’est la chose dont la destruction nous fait faire un premier pas vers la sortie de la prise d’otages du capital.

En tout cas, derrière « les entreprises ne créent pas d’emploi » il ne faut certainement pas voir un énoncé à caractère empirique — que les vingt dernières années confirmeraient pourtant haut la main en tant que tel... Il s’agit d’un énoncé conceptuel dont la lecture correcte n’est d’ailleurs pas « les entreprises ne créent pas d’emploi » mais « les entreprises ne créent pas l’emploi ». Les entreprises n’ont aucun moyen de créer par elles-mêmes les emplois qu’elles offrent : ces emplois ne résultent que de l’observation du mouvement de leurs commandes dont, évidemment, elles ne sauraient décider elles-mêmes, puisqu’elles leur viennent du dehors — du dehors, c’est-à-dire du bon-vouloir dépensier de leurs clients, ménages ou autres entreprises.

Dans un éclair de vérité fulgurant autant qu’inintentionnel, c’est Jean-François Roubaud, président de la CGPME et Saint Jean Bouche d’or, qui a vendu la mèche, à un moment, il est vrai, voué à être puissamment révélateur : le moment de la discussion des « contreparties ». Comme on sait à l’instant T moins epsilon qui précède la conclusion du « pacte », le patronat jure sur la tête du marché qu’il s’en suivra des créations d’emplois par centaines de mille et, comme de juste, à l’instant T plus epsilon on n’est tout d’un coup plus sûr de rien, il faudra voir de près, ne nous emballons pas, en tout cas il faut nous faire confiance.

Et voilà ce gros nigaud de Roubaud qui déballe tout sans malice ni crier gare : « encore faut-il que les carnets de commandes se remplissent... » [16] répond-il en toute candeur à la question de savoir si « les entreprises sont prêtes à embaucher en échange » [17]. C’est pas faux Roubaud ! Or si les entreprises « produisaient » elles-mêmes leurs propres carnets de commandes, la chose se saurait depuis un moment et le jeu du capitalisme serait d’une déconcertante simplicité. Mais non : les entreprises enregistrent des flux de commandes sur lesquels elles n’ont que des possibilités d’induction marginale (et à l’échelle agrégée de la macroéconomie aucune possibilité du tout [18]) puisque ces commandes ne dépendent que de la capacité de dépense de leurs clients, laquelle capacité ne dépend elle-même que de leurs carnets de commande à eux [19], et ainsi de suite jusqu’à se perdre dans la grande interdépendance qui fait le charme du circuit économique.

A quelques variations près, réglées par la concurrence inter-firmes, la formation des carnets de commandes, dont Roubaud nous rappelle — pertinemment — qu’elle décide de tout, ne dépend donc pas des entreprises individuellement, mais du processus macroéconomique général. En situation de passivité face à cette formation de commandes, qu’elles ne font qu’enregistrer, les entreprises ne créent donc aucun emploi, mais ne font que convertir en emplois les demandes de biens et services qui leurs sont adressées. Là où l’idéologie patronale nous invite à voir un acte démiurgique devant tout à la puissance souveraine (et bénéfique) de l’entrepreneur, il y a donc lieu de voir, à moins grand spectacle, la mécanique totalement hétéronome de l’offre répondant simplement à la demande externe.

On dira cependant que les entreprises se différencient, que certaines réduisent mieux leurs prix que d’autres, innovent plus que d’autres, etc. Ce qui est vrai. Mais n’a in fine d’effet que sur la répartition entre elles toutes de la demande globale... laquelle demeure irrémédiablement bornée par le revenu disponible macroéconomique. Ne peut-on pas aller chercher au dehors un surplus de demande au-delà de la limite du revenu interne ? Oui, on le peut. Mais le cœur de l’argument n’en est pas altéré pour autant : les entreprises enregistrent, à l’export comme à domicile, des demandes que, par construction, elles ne peuvent pas, individuellement, contribuer à former, et elles se borneront (éventuellement) à convertir ces commandes en emplois. En d’autres termes, les emplois ne sont que le reflet de demandes passivement perçues. Aucun geste « créateur » du type de celui que revendique l’idéologie patronale là-dedans. Les entrepreneurs et les entreprises ne créent rien (en tout cas en matière d’emploi) — ce qui ne veut pas dire qu’elles ne font rien : elles se font concurrence pour capter comme elles peuvent des flux de revenu-demande, et font leur boulot avec ça.

Non pas les entreprises : la conjoncture Retour à la table des matières

Tout ceci signifie alors que nous n’avons pas à déférer à toutes leurs extravagantes demandes au motif qu’elles détiendraient le secret de la « création des emplois ». Elles ne détiennent rien du tout. Mais si l’emploi n’est pas créé par les entreprises, par qui l’est-il donc, et à qui devraient aller nos soins ? La réponse est que le « sujet » de la création des emplois n’est pas à chercher parmi les hommes, en vérité le « sujet » est un non-sujet, ou pour mieux dire la création des emplois est l’effet d’un processus sans sujet, un processus dont le nom le mieux connu est la conjoncture économique — terrible déception de ceux qui attendaient l’entrée en scène d’un héros... La conjoncture économique est en effet ce mécanisme social d’ensemble par quoi se forment simultanément revenus, dépenses globales et production. Elle est un effet de composition, la synthèse inintentionnelle et inassignable des myriades de décisions individuelles, celles des ménages qui vont consommer plutôt qu’épargner, celles des entreprises qui lanceront ou non des investissements — et, drame pour la pensée libérale-héroïsante, il faut avoir la sagesse intellectuelle de s’intéresser à un processus impersonnel.

Mais s’y intéresser, on le peut, et très concrètement même ! Car la conjoncture est un processus qui, dans une certaine mesure se laisse piloter. C’est précisément l’objet de cette action qu’on appelle la politique macroéconomique. Mais, de cela, le gouvernement « socialiste » a manifestement abdiqué toute velléité : ligoté par les contraintes européennes qui ont si bien neutralisé toute possibilité de politique économique active, et ayant renoncé par avance à tout effort de retrouver quelque marge de manœuvre en cette matière, il ne lui est plus resté qu’à dévaler avec tout le monde la pente de l’idéologie libérale-entrepreneuriale pour former le puissant raisonnement que « si ce sont les entreprises qui créent les emplois, alors il faut être très gentil avec les entreprises ».

Cependant, n’y a-t-il pas une contradiction à dire que le capital a toute initiative et qu’il prend — activement — la société en otage, quand, par ailleurs, on soutient que les entreprises sont réduites à enregistrer — passivement — des demandes qu’elles n’ont aucun pouvoir de former, et qu’elles n’ont dès lors nulle capacité de « créer l’emploi ». Il n’y a là en fait rien de contradictoire mais l’effet d’une asymétrie d’échelle, et une discontinuité classique quand on passe du microéconomique au macroéconomique. Les entreprises séparément n’ont aucune prise sur rien. C’est la composition de toutes leurs décisions qui fait tout. Mais cette composition est la plupart du temps inintentionnelle et sans cohérence spéciale — on en constate juste le résultat —, puisque c’est précisément le propre d’une économie de marché, c’est-à-dire d’une économie décentralisée que les agents y prennent leurs décisions par devers eux et sans coordination avec les autres. Aussi chacun d’eux est-il renvoyé à son isolement et à sa condition passive.

La situation change lorsque se présente un coordinateur. Le « capital » prend peut-être son sens le plus haut lorsqu’il apparaît ainsi sous l’espèce de la collectivité coordonnée des détenteurs de moyens de production. Certes le capital existe hors de cet état coordonné, et l’on peut bien maintenir qu’il est souverain — et preneur d’otages. Mais c’est un souverain désarticulé — un pur effet de composition acéphale. Et il n’est qu’un preneur d’otages de fait. Disons plus précisément : la société se retrouve otage du processus impersonnel en quoi consiste la synthèse des décisions des propriétaires individuels. Le souverain preneur d’otages ne prend alors vraiment sa forme consistante qu’au moment où le capital accède au stade du pour-soi en se posant, sous l’égide d’un coordinateur explicite (typiquement le MEDEF), comme une unité d’action consciente. C’est par passage du microéconomique au macroéconomique, c’est-à-dire de l’entreprise au capital, qu’apparaît véritablement la lutte de classes à l’échelle de la société entière, soit : un groupe constitué et unifié contre le reste.

On dira que ce capital coordonné se tire une balle dans le pied lorsqu’il s’engage dans son chantage caractéristique de la grève de l’investissement puisque, à gémir que rien n’est possible, il conduit en effet tous ses membres à gémir de concert, et de concert aussi à retenir leurs avances (leurs projets)... c’est-à-dire in fine à torpiller pour de bon la conjoncture dont pourtant ils vivent tous. Se seraient-ils coordonnés sur la position inverse qu’ils ne se seraient pas moins donné raison, mais cette fois en soutenant une conjoncture brillante... telle qu’ils auraient tous contribué à la former. Mais d’une part, le capital, dont Marx rappelait qu’il est incapable de dépasser « ses intérêts grossiers et malpropres », est le plus souvent hors d’état d’accéder à ce degré de rationalité. Et d’autre part, c’est l’horizon même de ces intérêts grossiers et malpropres qui lui désigne les bénéfices immédiats du chantage à l’investissement, contre lequel il espère bien ramasser autant d’avantages en nature (exonérations de toutes sortes, réglementaires et fiscales) que possible — et c’est une rationalité qui en vaut une autre : non pas la rationalité de l’entrepreneur mais celle de l’extorsion. Et si, par une asymétrie caractéristique, le capital refuse, au nom d’un argument idéologique, la coordination positive de l’investissement (« que le libre marché fasse son œuvre ! »), il est en revanche très capable de la coordination négative du chantage et de l’ultimatum.

On peut donc soutenir sans la moindre contradiction et la thèse de la prise d’otages (globale, celle du capital) et celle de la vaine prétention des entreprises à « créer l’emploi ». Les entreprises, séparément, ne créent rien. Mais il est vrai que, liguées en capital coordonné, elles décident de tout. Reconnaissons qu’à la profondeur où l’ânerie des « entrepreneurs qui créent l’emploi » est désormais enkystée, mesurable à la vitesse-éclair à laquelle elle vient à la bouche de l’éditorialiste quelconque, le travail d’éradication va demander du temps. Raison de plus pour l’entamer tout de suite. La politique se portera mieux, c’est-à-dire un peu plus rationnellement, quand ses discours commenceront d’être à peu près purgés de toutes les contrevérités manifestes, et manifestement attachées à un point de vue très particulier sur l’économie, et quand les schèmes de pensée automatique que ces contrevérités commandent auront été désactivés. Les entreprises ne créent pas l’emploi : elles « opèrent » l’emploi déterminé par la conjoncture. Si l’on veut de l’emploi, c’est à la conjoncture qu’il faut s’intéresser, pas aux entreprises.

Mais faire entrer ça dans une tête « socialiste »... Il est vrai que parmi le programme chargé des conversions symboliques à opérer, il y a à défaire l’habitude irréfléchie qui consiste à donner le parti socialiste pour la gauche, et à donner (très inconsidérément) de la gauche au parti socialiste. Alors que, rappelons-le, et il met d’ailleurs assez d’effort comme ça pour qu’on n’en doute plus et qu’on puisse l’en « créditer », le parti socialiste : c’est la droite ! La Droite Complexée. A propos de laquelle, du train où vont les choses, il va bientôt falloir se demander ce qu’il lui reste exactement de complexes.

Notes

[1] Proposé en janvier par M. Hollande, le « pacte de responsabilité » offre aux entreprises un allégement de cotisations sociales de 30 milliards d’euros... dans l’espoir que celles-ci voudront bien, en contrepartie, créer des emplois...

[2] France 2, 7 janvier 2013.

[3] BFM-RMC, 6 janvier 2014.

[4] Les Echos, 4-5 mai 2013.

[5] Les Echos, 23 mai 2013.

[6] Les Echos, 23 mai 2013.

[7] Matthias Fekl, député proche de Pierre Moscovici, cité in Lénaïg Bredoux et Stéphane Alliès, « L’accord sur l’emploi fracture la gauche », Mediapart, 28 avril 2013.

[8] Dans la nouvelle d’Edgar Allan Poe La Lettre volée (1844), tous les protagonistes recherchent fébrilement un billet d’une importance décisive qu’ils supposent caché, mais qui est en fait posé en évidence sur un bureau.

[9] Cité in Julien Ponthus, « Hollande, VRP de la “start-up République” à San Francisco », Reuters, 12 février 2014.

[10] Arnaud Montebourg, « La Matinale », France Inter, 18 février 2014.

[11] « Le président de la CNAF dément la Présidence de la République », blog de Gérard Filoche, 27 janvier 2014.

[12] Christian Chavagneux, « Pourquoi le pacte de responsabilité n’améliorera pas les marges des entreprises et ne créera pas d’emplois », blog Alternatives Economiques, 6 janvier 2014.

[13] Id.

[14] Daniel Cohen, « La baisse des charges est davantage une option pratique qu’une conversion idéologique », entretien avec Franck Dedieu, L’Expansion, 18 février 2014.

[15] Pour un démontage en règle de cette thèse, voir le petit livre de Laurent Cordonnier, Pas de pitié pour les gueux, éditions Raisons d’agir, 2000.

[16] Les Echos, 3 janvier 2014.

[17] Id., la question lui est posée par Derek Perrotte.

[18] En tout cas hors de toute coordination.

[19] Commande de travail pour les ménages-salariés, commande de biens et services pour les entreprises-clientes.

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2 mars 2014 7 02 /03 /mars /2014 10:45

Une35 Une35

Une35

  • Editorial : Depuis deux décennies, et jusqu'à ces derniers jours, les ambitions impériales et l'arrogance provoquent chaos et désolation
  • Analyse : La majorité du peuple suisse a infligé une claque à la classepolitique, au patronat, et à l'Union européenne
  • Infos : Dans une situation qui reste incertaine, l'opposition ukrainienne a renversé le pouvoir en place à Kiev
  • Commentaire : L'Ukraine fait l'objet d'une rivalité de puissances, y compris au sein du camp occidental
  • Entretien : la chercheuse Françoise Morvan analyse les véritables enjeux de la "Charte des langues régionales".

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1 mars 2014 6 01 /03 /mars /2014 15:38

Lu sur le blog de l'UL-CGT de Dieppe.  Ils ont entièrement raison!

Les salariés  qui se couchent tôt, se lèvent tôt et sont en repos ou en congé ces matins là  - que de conditions !-  peuvent aller  voir " Les Jours Heureux" à

 

Rouen à l'Omnia République

 

Dimanche 2 Mars, Lundi 3 Mars, Mardi 4 Mars à 11 heures.

 

Nous avons appris que l'UL -CGT d'Elbeuf fera une projection suivie d'un débat autour des "Jours Heureux" au  cinéma   "Mercure" à Elbeuf dans la semaine du 12 au 18 Mai Le jour et l'heure ne sont pas encore fixés.

Enfin... ! Figurez-vous que... Oui ! la télévision programme (enfin !) le documentaire "les jours heureux".... Oui,... mais à 23h30, un lundi, le 3 mars, pour que vous ne puissiez jamais le voir !

Pensez-donc,... "Les jours heureux" !!! C'est ringard ! Il ne faut surtout pas que les salariés en rêvent... des jours heureux ! Aujourd'hui c'est la galère pour eux... alors des jours heureux,  pour soi, pensez-donc ! Un rêve... inaccessible !

C'est ici qu'on voit qu'il y en a qui réfléchissent, ceux qui programment les films: ils pensent pour vous, et à votre place, pour que vous ne vous interrogiez pas sur un possible retour de jours heureux... demain... plus tard... jamais !

Résumé du documentaire: 

Entre mai 1943 et mars 1944, sur le territoire français encore occupé par l'armée allemande, seize hommes, appartenant à divers partis politiques, mouvements de résistance et syndicats (dont la CGT, car il n'existait que deux syndicats, clandestins à l'époque: la CGT et la CFTC) et, rédigent le programme du Conseil national de la résistance, un document intitulé "Les Jours heureux", qui va durablement changer le visage de la France à la Libération.

Ce programme est encore, pour l'instant, au coeur du système social français, apportant des avancées décisives en matière de couverture sociale, de prévoyance, mais aussi de libertés. Des avancées que le pays n'avait pas connues depuis le Front populaire.

"Les jours heureux" enfin annoncés à Dieppe.

Le documentaire est programmé, mais pour une seule séance, le mardi 25 mars 2014 à 18h30, et serait suivi d'un débat: avec qui ? Pour le moment la CGT n'est pas invitée.

Les bruits courent qu'on parlerait de donner, peut-être, la parole à la CGT. Mais on ne voudrait parait-il pas qu'elle co-organise la soirée. Nous rappelons à toute fins utiles aux organisateurs anonymes, que Louis Saillant, le représentant de la CGT a présidé le CNR; que "les jours heureux" — le programme — s'est largement inspiré du programme de la CGT. De même, nous rappelons que sur les monuments aux morts de la région, il y a beaucoup de noms de militants de la CGT qui ont donné leur vie pour que "les jours heureux" arrivent.

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28 février 2014 5 28 /02 /février /2014 15:57


Marine Le Pen est à Elbeuf ce 28 Février.
Une réunion s’est tenue pour organiser une manifestation    Cette manifestation aura lieu

Place du Calvaire à 17h 30 pour dire

« Marine Le Pen n’est pas la bienvenue à Elbeuf »..

 

 

LE FN SE NOURRIT DU DÉSESPOIR ET DE LA COLÈRE ENGENDRÉS PAR LA POLITIQUE DU PS ET DE LA DROITE


Action communiste participera à cette manifestation mais n’a pas signé le texte commun que le PS a signé.  Nous ne l’avons pas signé car si nous partageons la dénonciation des mensonges du FN, il ne dit rien sur les responsabilités du patronat, de la droite puis du PS au pouvoir dans la montée du Front National.  Or ce dernier se nourrit du désespoir engendré par le chômage, la casse du code du travail et des services publics.  C’était la politique de Sarkozy.  C’est aussi la voie choisie par Hollande : celle que droite et social-démocratie votent ensemble à Bruxelles …sous les ordres du patronat européen. 
Un grand nombre de Français n’ont plus de repères  politiques parce que les deux grands partis politiques sont totalement alignés sur les politiques libérales européennes.  Ils sont désorientés parce qu’aucun syndicat, aucun parti politique à gauche n’a de proposition solide contre la politique européenne. Depuis que le PCF, avec Robert Hue a abandonné sa bataille contre l’intégration européenne mais propose de « refonder l’Europe », aucune formation politique à gauche ne porte la bataille de la souveraineté populaire et nationale.  La CES dans laquelle  se retrouvent la majorité des syndicats a appelé à voter « oui » au traité constitutionnel et ne cherche depuis qu’à aménager la version européenne du capitalisme.  Elle prône avec d’autres syndicats et partis politiques une Europe sociale totalement rêvée.  C’est une voie sans issue et les salariés, les Français le savent.  Le PS, lui aussi avait appelé à voter oui à la « concurrence libre et non faussée » et malgré le « non » a voté, avec la droite,  le traité de Lisbonne qui est mis en œuvre depuis.
Le député Bachelay a tenté en 2012 de nous vendre localement cette « Europe sociale » en expliquant que le PS au pouvoir se battait pour faire changer le rapport de force et modifier le traité Sarkozy-Merkel. Or Hollande l’a signé tel que et l’applique.  Comment, au mieux, ne pas se replier sur soi, quand on est un salarié, un chômeur, qui a cru que Hollande allait faire une autre politique que Sarkozy ?
Le FN capitalise tout cela.  Selon un sondage plus du tiers des Français adhèreraient aux idées du FN.  A prendre avec prudence.  Car parmi ce tiers, 64% sont contre la sortie de l’euro et 72% rejettent la préférence nationale en matière d’emploi.  14% seulement adhèrent à ses solutions.  C’est déjà beaucoup.
Mais la réalité du Front National, ce ne sont pas seulement les déclarations de Marine Le Pen relayées par les télés et radios.  Il se cache derrière ce discours une réalité plus dangereuse.

Le Front National cherche à dédouaner les patrons
En imputant à l’immigration les problèmes du chômage , d’insécurité, du déficit de la sécurité sociale, le FN dédouane les patrons et le pouvoir politique de leur responsabilité. Ce ne sont plus les patrons qui sont responsables mais l’immigré.  Ce n’est plus l’exploiteur qui est responsable mais l’exploité !  Le FN cherche à diviser les salariés et à opposer le travailleur immigré et le travailleur français. 
En réalité le FN ne propose pas de solution durable car il ne remet pas en cause l’ordre économique existant mais seulement certains de ses effets. 

Baisser les dépenses et donc abaisser les services publics
Dans tous les programmes proposés aux municipales, le FN, entonne le refrain des chantres de l’austérité : il faut baisser les dépenses car la crise est là.  Ils ne disent rien sur la responsabilité des spéculateurs et des banques, ils ne se battent pas pour l’annulation des dettes.  Au contraire ils proposent de baisser les dépenses et de diminuer les impôts fonciers des entreprises.… De même ils dénoncent le trou de  la sécurité sociale en accusant les immigrés et ignorent les vrais responsables : le chômage de masse, les bas salaires et les exonérations de cotisations sociales qui privent la sécurité sociale de centaines de millions d’euros.

Le Front National n’aime pas les syndicats et applaudit à la criminalisation des actes syndicaux
Marine Le Pen dit vouloir « protéger » les salariés mais elle n’aime pas les syndicats.  Elle veut regrouper les salariés dans des syndicats corporatistes  qui accepteraient les compromis de régression sociale au nom de soi-disant intérêts communs patrons-salariés … .  C’est qu’elle ne veut pas de luttes de classe. Le FN déteste les syndicats, au moins autant que Sarkozy les détestait.  Et plus particulièrement la CGT.  Stéphane Ravier, tête de liste du FN à Marseille réclame de libérer Marseille des « agissements de ces officines et autres syndicats d’intérêts » ( c’est à dire les syndicats des salariés ).  Fabien Engelmann, conseiller politique de Marine Le Pen au « dialogue social » réclame de « nouveaux syndicats libres, autonomes, et non politisés ».  C’est à dire ?  Ce qui est certain c’est que le FN rêve de syndicats qui ne critiqueraient ni les patrons, ni le système capitaliste et surtout pas  le Front National !  Le FN n’a jamais soutenu les luttes sociales. Il a même appelé le pouvoir sarkoziste à s’en prendre aux piquets de grève organisés par les salariés lors du conflit des retraites. Marion Maréchal Le Pen s’est opposée violemment à la loi d’amnistie sociale pour les condamnations subies lors d’actions commises pendant les conflits sociaux. « Les syndicalistes casseurs et violents se trouvent incités à persévérer » a-t-elle dit.  Et elle a voté avec les socialistes et la droite le rejet de la loi d’amnistie.

Anti-atlantiste de fraiche date
Il est vrai que Marine Le Pen s’oppose au traité avec les Etats-Unis.  Mais ce ne fut pas toujours le cas.  Tout d’abord parce que Jean-Marie Le Pen est un admirateur de longue date du libéralisme capitaliste le plus effréné.  Il admirait Reagan, Margaret Thatcher et leur politique.  Plus récemment, Marine Le Pen rendait hommage à celle qui laissa mourir Bobby Sands et se montra si impitoyable dans sa lutte de classe contre les mineurs britanniques. La posture anti-atlantiste de Mme Le Pen aujourd’hui est conjoncturelle.  Tout comme son opposition à l’UE.  Quant à la sortie de l'euro, elle veut la négocier avec l'Allemagne ... On peut attendre.  Il s’agit avant tout pour le FN d’une stratégie de conquête du pouvoir.

Le FN défend le système capitaliste
Son protectionnisme n’est que la défense des capitalistes nationaux dans leur concurrence mondiale.  Il ne propose de nationaliser ( banques, Pétroplus) que temporairement.  C’est-à-dire d’utiliser l’argent de l’Etat pour renflouer pour ensuite rendre aux actionnaires.  Il veut nationaliser les pertes pour mieux reprivatiser les profits.

Les médias valorisent la parole lepeniste et ignore la gauche radicale

Mais ce que retiennent les Français, c’est ce que promeuvent les médias.  Elle apparaît comme la seule anti-système.  C’est pour cela qu’elle se garde bien aujourd’hui de réitérer sa main tendue à la droite.  Elle garde cela pour le deuxième tour.

A gauche, des économistes comme Frédéric Lordon, Jacques Sapir préconisent la sortie de l’euro. Des mouvements comme Action Communiste, le PRCF, Rouge-Midi, Rouges vifs, le M’PEP … le réclament également, tout comme les adhérents du PCF qui se regroupent dans « Faire vivre le PCF ».  Le débat continue à gauche, y compris au Front de gauche. En France et en Europe.   Les propositions de la vraie gauche en ce domaine ont l’avantage d’être crédibles car elles s’appuient sur une  rupture avec l’ordre existant, l’instauration d’échanges équitables et de coopérations mutuellement avantageuses qui échapperaient à la logique capitaliste des profits et de la domination.  Il est grand temps que toute la gauche radicale s’unissent contre les politiques européennes et ses outils : les différents traités, l’euro, les institutions…  Ne laissons pas le FN seul mener la bataille contre le traité transatlantique, l'euro et les institutions européennes.

Tout abandon du terrain nourrit le Front National
En guise de conclusion, ce texte de  Frédéric Lordon ( Mai 2012, Le Front National, mêmes causes, mêmes effets) nous paraît mériter beaucoup d’attention :

« On ne reconnaît pourtant jamais si bien la surdité politique qu’à son empressement à certifier qu’elle a « bien entendu le message » et que « les Français ont envoyé un signal fort». Il faut croire que la force adéquate du « signal », désormais, ne devrait pas viser en dessous du coup de fourche pour que « le message soit entendu » pour de bon. En attendant, de secousse en secousse, le FN fait sa pelote, et toujours pour les mêmes raisons, celles de la protestation antilibérale constamment réaffirmée, et du déni qui lui est constamment opposé. Il faut donc vraiment des œillères pour ne pas voir, ou ne pas vouloir voir, la régularité granitique qui conduit la vie électorale française : quand l’orthodoxie néolibérale pressure les salaires, dégrade les conditions de travail, précarise à mort ou jette au chômage, quand elle détruit les services publics, abandonne les territoires par restriction financière, menace la sécu et ampute les retraites, toute proposition de rupture reçoit l’assentiment, toute trahison grossit le ressentiment, tout abandon du terrain nourrit le Front national ».

 

Action Communiste

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24 février 2014 1 24 /02 /février /2014 09:51

bonhomme-rouge

Jusqu’ici, quand un million de personnes manifestait à Paris pour défendre les retraites, notre libre presse déclarait le lendemain : « mobilisation en demi-teinte »


C’est fini, désormais, de TF1 à France Inter et de Libé au Figaro, on nous explique que 50 000 personnes à Kiev, encadrées par des paramilitaires, arborant les drapeaux européens et chantant des chants nazis, cela représente l’ « espoir de tout un peuple ». Bon à rappeler en temps utiles quand nous tenterons ici de manifester sur les Champs-Elysées, interdits depuis toujours aux manifs de prolos (faut pas rire, quand même !)…



Jusqu’ici, quand vous étiez chargés par les CRS à l’issue d’une manif de défense de l’emploi ou de la Sécu, ou quand vous affrontiez les flics dans les rues de Nantes parce que vous contestez l’Ayrault-port, vous étiez de la graine d’émeutier pratiquant la « violence urbaine ». C’est fini. Désormais, pourvu que votre but soit de frapper des communistes ou de réclamer – en anglais comme il se doit – « plus d’Europe ! », vous aurez le droit d’occuper des préfectures, de tirer sur les policiers, de renverser le gouvernement légal, d’incendier le mobilier urbain, d’abattre les statues qui vous déplaisent, d’interdire les partis que vous désapprouvez (en Ukraine, les « démocrates européens » ont interdit le PC ukrainien et le « parti des régions »). Si vous procédez ainsi, non seulement vous serez encensés par nos médias rose pâle et bleu-marial, mais vous recevrez la visite de Kerry, le soutien enthousiaste de Fabius, les déclarations urbi et orbi de BHL, l’homme qui à lui seul (ou presque…) a semé le chaos en Libye et en Afrique occidentale ; et tous ces hérauts de la Liberté trouveront tout naturel que vous disposiez de kalachs et que vous pilliez des dépôts d’armes puisque vous agissez « pour l’Europe » et pour l’ « Union transatlantique ». « Lebensraum », disait quelqu’un dans les années 30, « besoin d’aire » répond en écho le MEDEF, « élargissement de l’UE », pense en sourdine la Commission de Bruxelles... Car, voyez-vous, quand le sang coule pour l’U.E. atlantique, que ce soit à Belgrade, à Tbilissi ou à Kiev, demain à Minsk, cela s’appelle la  PAIX.



Les militants franchement communistes que nous sommes appelleront-ils pour autant à l’insurrection populaire immédiate en France contre cette « construction » européenne qui tue notre pays à petit feu avec la Kollaboration zélée du Parti Maastrichtien Unique ? Certes non ! car nous irions aussitôt en taule : l’appel à l’insurrection est en effet interdit par notre belle loi « républicaine » qui a oublié l’article 35 de la Constitution française de l’An I, inspirée par le « tyran » Robespierre : « quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour toute portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs ».



Pour nos médias, cette phrase ne vaut que si on peut s’y référer pour faire tomber le Venezuela bolivarien, renforcer la tenaille militaro-politique contre la Russie, créer des troubles à Cuba, déstabiliser la Syrie, diviser la Bolivie et, prochainement sans doute, s’attaquer à la Biélorussie : qu’importent alors les « formes » démocratiques, on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs, que diable !


En réalité, s’agissant de la Franceurope, vous l’aurez compris, il faut inverser la phrase de Robespierre et la réécrire ainsi :

« quand le peuple conteste le gouvernement, la censure la plus totale et la répression la plus brutale sont, pour les euro-gouvernants, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs »…

 

 

Floréal


source: http://www.initiative-communiste.fr/

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16 février 2014 7 16 /02 /février /2014 15:15

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Communiqué de Cuba Si France Provence en réponse au "reportage' honteux diffusé hier soir dans le JT de 20H de France 2 (cliquez ici pour le voir: JTFRANCE2-13/02/2017).

Cuba Si France Provence a été scandalisée par la façon dont David Pujadas a évoqué, au cours de l'édition de 20h du Journal Télévisé, jeudi 13 février, les événements qui se sont déroulés au Venezuela le 12 février dernier :

« Durcissement du régime au Venezuela. Le successeur d'Hugo Chavez, Nicolas Maduro fait face à des manifestations grandissantes. Hier, des tirs à balles réelles ont été entendus à Caracas et 3 personnes ont été tuées parmi les étudiants et les opposants qui défilaient contre la vie chère, l'insécurité et les pénuries ».


En présentant les choses de cette façon, on entend que la police a tiré sur des manifestants pacifiques. Or, la vérité est totalement différente.

Ces manifestations, qui ont eu lieu dans tout le pays, étaient organisées par des groupes radicaux d'extrême droite et leur but était de générer la violence pour provoquer une situation de chaos qui pourrait justifier une intervention étrangère. C'est une situation que le Venezuela a déjà connue en 2002, lors du coup d'Etat manqué contre le Président Hugo Chavez.

 

Le Venezuela est actuellement en butte à une guerre économique livrée par les groupes fascistes et les spéculateurs contre lesquels le Gouvernement Bolivarien a pris récemment des mesures fermes pour que les produits soient enfin vendus à la population à leur juste prix. Ces mesures commencent à porter leurs fruits et il n'y a dans le pays, aucune manifestation contre la vie chère.

 

Quant à l'insécurité, elle est surtout importante dans les états gérés par des gouverneurs d'extrême droite et des mesures ont été également prises récemment par le Gouvernement pour en venir à bout.

 

En ce qui concerne les « tirs à balles réelles », c'est bien une réalité et ils ont fait 3 morts mais les armes à feu étaient aux mains des groupes de choc et non de la Police. Comme par hasard, Monsieur Pujadas a oublié de le préciser...

 

Mais ce qui est le plus grave, c'est que les morts ne sont pas des opposants comme il a été dit : Juan Montoya était membre du collectif révolutionnaire 23 Janvier, et Bassil Da Costa, étudiant (mais pas opposant). 17 des blessés sont des fonctionnaires de police ou des militaires, et 49 sont des civils. Il n'y a donc aucune victime dans le camp des « opposants », ou pour mieux dire, des groupes de choc.

 

Cuba Si France Provence demande à la chaîne qui a diffusé ces contre-vérités un droit de réponse.

 

Les téléspectateurs français ont le droit de connaître la vérité.

 

Salon-de-Provence, le 14 février 2014

Pour Cuba Si France Provence,

la présidente,

Françoise Lopez

Source:http://cubasifranceprovence.over-blog.com/2014/02/venezuela-communique-de-cuba-si-france-provence.html

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1 février 2014 6 01 /02 /février /2014 16:28

Une polémique s'est ouverte à propos d'une rencontre de Thierry Le Paon avec le CRIF.  Nous publions le texte trouvé sur le site du CRIF et la mise au point faite par le dirigeant de la CGT.  Nous nous demandons si il était opportun que le secrétaire de la CGT qui s'est battue contre le colonialisme français rencontre le représentant d'une organisation qui soutient la politique de colonisation de l'Etat d'Israël.  Par ailleurs certaines organisations de la CGT, confrontées à ces questions de partenariat avec des entreprises israëliennes participant à la colonisation, ont pris position contre ces accords.  Nous avons d'ailleurs mis en ligne il y a quelque temps une intervention de la CGT d'Orange demandant à l'entreprise de rompre son partenariat avec Partner, une entreprise israëlienne participant à la colonisation. 

 

Ci-dessous le communiqué du CRIF

Au cours de l’entretien avec le Président du CRIF, les responsables de la CGT Thierry Lepaon, Secrétaire Général et Éric Laffont, secrétaire confédéral, ont démenti tout soutien au BDS (Boycott Désinvestissement Sanction), contre Israël ; ils ont affirmé que si des militants de la CGT ont pu, ici ou là, afficher un tel soutien, ils n’avaient aucun mandat pour le faire."


La réponse de Thierry Le Paon

 

Thierry Lepaon écrit à Roger Cukierman

"vendredi 31 janvier 2014

Suite à la rencontre entre le CRIF et la CGT du 28 janvier dernier et la référence qui en est faite sur leur site, voici le courrier que Thierry Lepaon a adressé ce jour à Roger Cukierman, Président du CRIF.

Monsieur le Président,

Je suis très étonné de découvrir un compte-rendu à la fois partiel et erroné de la rencontre que nous avons eue avec vous-même et des représentants de votre association. Rappelons que cette rencontre faisait suite à une invitation de votre part afin d’évoquer les questions d’actualité et notamment la question de la montée de l’extrême droite et notre inquiétude commune face aux relents d’antisémitisme, d’islamophobie et plus globalement de racisme dans notre pays.

Sur la méthode d’abord, lorsqu’une rencontre de ce type est prévue avec des dirigeants de la CGT et notamment le Secrétaire général, il est d’usage de nous faire part au préalable de l’intention de rendre compte publiquement de l’échange et d’en faire vérifier le contenu par les participants. Ce manque de rigueur de la part d’une organisation comme le CRIF est de nature à entacher une relation de confiance entre nos organisations.

Cette démarche aurait permis de corriger une grave inexactitude dans les propos que vous me prêtez concernant la position de la CGT vis-à-vis de la campagne BDS (Boycott Désinvestissement Sanction). En l’occurrence, je n’ai fait que confirmer que la CGT ne s’inscrivait pas dans la campagne BDS. En revanche, la CGT n’a jamais condamné ni ce mouvement ni ses acteurs dont certains sont d’ailleurs des adhérents de la CGT.

Le titre de l’article « La CGT condamne le BDS » posté sur votre site sous la rubrique « Le CRIF en action » me paraît relever d’une intention qui n’est pas respectueuse à l’égard de la CGT et de ses prises de positions.

Je vous demande donc de le supprimer. Afin qu’il ne subsiste aucune ambiguïté sur ce sujet, je me permets de vous rappeler brièvement la position de la CGT et les actions qu’elle mène, aussi bien en faveur de la paix entre les peuples israéliens et palestiniens que de la liberté d’expression des militants du BDS en France.

Ces actions s’inscrivent dans la solidarité de la CGT à l’égard des travailleurs de tous les pays et en faveur de la paix dans le monde. Elles partent du constat de la situation dramatique de la Palestine qui s’enracine dans l’occupation illégale des territoires conquis par Israël et le renchérissement de sa politique de colonisation. La CGT a toujours œuvré aux côtés de celles et de ceux qui se mobilisent pour la paix, en Israël comme en Palestine. Elle entretient des contacts syndicaux avec les travailleurs de cette région et c’est en lien avec ces organisations syndicales qu’elle recherche les moyens les plus efficaces et participe aux campagnes en faveur d’une paix juste et durable au proche-orient.

C’est le sens de la délégation conduite par Bernard THIBAULT en février 2013 en Palestine, à Gaza et en Israël. Forts de cette approche, nous considérons que le boycott global d’Israël ne favorise pas cette stratégie de paix et la coexistence de deux Etats, l’Etat Palestinien et l’Etat d’Israël. Par contre, la CGT s’inscrit totalement dans la campagne d’interdiction des produits fabriqués dans les colonies et dans l’obligation de transparence sur l’origine des produits israéliens destinés à l’exportation afin que l’Etat d’Israël soit contraint de respecter le droit international.

Enfin, je vous rappelle que la CGT, par la voix de Bernard THIBAULT, alors Secrétaire général, est signataire de l’appel initié par Stéphane HESSEL pour la relaxe des militants poursuivis pour leur participation à des actions de boycott. Ce soutien a été renouvelé le 17 décembre dernier, par une délégation de la CGT, de la LDH, de l’AFPS et de parlementaires auprès de la Ministre Christiane TAUBIRA demandant le retrait des circulaires Alliot-Marie et Mercier. Je tiens à vous préciser que je rendrai ce courrier public et vous prie d’agréer, Monsieur le Président, mes salutations distinguées.

Thierry Lepaon
Secrétaire général de la CGT

 

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6 janvier 2014 1 06 /01 /janvier /2014 16:14
« Combattre l’antisémitisme ?
Oui, mais pas avec M. Valls ! » par Annie Lacroix-Riz

 

Comment ne pas relever que ceux qui dénoncent l’indéniable antisémitisme de Dieudonné sont ceux-là mêmes qui ne disent mot aux Français de l’antisémitisme de leurs « alliés » ukrainiens, héritiers auto-revendiqués de Petlioura, de ses sbires pogromistes d’avant-guerre et de Deuxième Guerre mondiale; qui arment la main des djihadistes partout au Proche-Orient, contre chrétiens, juifs et quasi-totalité des musulmans; qui insultent librement les Roms et tous les « non-blancs »?

Comment oublier que le soutien sans faille de la politique d’apartheid d’Israël

) encourage au sein de la population française, musulmane ou non, l’assimilation, qui n’a pas lieu d’être, entre sionistes se considérant comme délégués en France de la politique d’Israël et juifs, et

) apporte de l’eau au moulin de l’antisémitisme?

Il faut lutter résolument contre l’antisémitisme de Dieudonné, et il faut, par les explications nécessaires, faire en sorte que Manuel Valls, qui exclut les Roms et ricane sur les Arabes et les « blacks » de la cité qu’il a dirigée, et qui pratique à l’égard d’Israël une admiration dévote manifestement destinée à plaire pour satisfaire ses hautes ambitions politiques, ne puisse s’attribuer la palme de l’antiracisme. Ce ministère de l’intérieur qui oppose entre elles les composantes ethniques et/ou culturelles vivant en France n’est pas qualifié pour lutter contre l’antisémitisme.

 

Annie Lacroix-Riz, professeur émérite d’histoire contemporaine, juive athée et laïque, petite-fille de déporté.

 

Lu sur Initiative Communiste

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3 janvier 2014 5 03 /01 /janvier /2014 17:29

En laissant prise à l'assimilation de l'antisionisme à l'antisémitisme, l'humoriste Dieudonné dessert la cause qu'il a longtemps prétendu défendre. Cet amalgame ne peut que réjouir l'UMP et le PS, objectivement unis par une tactique commune à la fois naïve et suicidaire dans la préparation des prochaines élections municipales et européennes.

 


« L'affaire Dieudonné » : à qui profite le crime ?



Dieudonné salit la cause palestinienne.  
Et voilà que Manuel Valls, dont on ne peut pas dire que le combat anti-raciste soit la qualité principale, nous fait le coup de l'indignation humaniste à propos de l'antisémitisme de Dieudonné. Nous ne le lui reprocherons pas : les obscénités de l'humoriste sont inexcusables. Naguère, l'ethnologue Claude Lévi-Strauss  avait déclaré lors d'un entretien avec le journaliste de France-Culture Georges Charbonnier que « le barbare, c'est celui qui croit à la barbarie ». Un être humain qui déplore (« dommage » dit Dieudonné...) l'absence de chambre à gaz à propos d'un journaliste juif incarne littéralement la barbarie. C'est une faute que nous ne saurions pardonner car Dieudonné salit du même coup deux causes que nous tenons pour justes : l'antisionisme et, corrélativement, la cause palestinienne. Après cela, que reste-t-il de la fin des Réflexions sur la question juive, lorsque Sartre concluait en substance que tant qu'un juif dans le monde craindra pour sa vie parce qu'il est juif, nous ne serons pas libres ? Dieudonné est en train de faire le jeu immoral de ceux qui identifient antisémitisme et antisionisme. Et c'est peut-être bien une première raison pour laquelle il lui est fait tant d'écho.

Un jeu dangereux
Une seconde raison est que, faire de Dieudonné une victime en interdisant ses spectacles, pourrait contribuer à la montée électorale du Front national. En effet, celui-ci n'est plus avare de déclarations condamnant l'antisémitisme et la colonisation dans les territoires occupés. Que cette tactique soit ou non sincère n'est pas ici le sujet. En revanche, la promotion des idées du FN est un jeu dangereux. Les politiciens qui s'y adonnent ont la naïveté de croire que rien n'a changé depuis le temps où Pierre Bérégovoy croyait que la montée du FN rendrait  la droite « inéligible ». Les socialistes et leurs alliés feraient bien de se demander si, lors des prochains scrutins, les électeurs voudront « barrer la route au FN » en reportant leurs voix sur le PS, qui fait bon an mal an la promotion du parti lepéniste depuis 1984. Quant aux électeurs de droite, pourquoi diable barreraient-ils la route au FN au profit de l'UMP qui s'exténue à tenter de lui ressembler ?  

Stigmatiser l’euroscepticisme, c’est mépriser les peuples
Ni le PS ni l'UMP ni le centre n'ont compris que l'exaspération des électeurs a atteint un degré où le pire est possible, et qu'en conséquence, les insultes de préau d'école ne trompent plus grand'monde. C'est ainsi de l'expression « National populisme » censée stigmatiser la puissante montée de l'euroscepticisme non seulement en France mais aussi dans le reste de l'Europe. Les politiciens minuscules qui l'utilisent, comme récemment Jean-Christophe Cambadélis, risquent de s'en apercevoir à leur dépens, mais il sera vraisemblablement trop tard pour réparer les dégâts causés par leur sale besogne.  

Pascal Acot

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10 décembre 2013 2 10 /12 /décembre /2013 21:44

La disparition récente de Paul Aussaresses, tortionnaire en Algérie puis au Brésil, puis vendeur d'armes pour la société Thomson, appelle plusieurs commentaires : l'un sur l'Europe – dont on ne peut dire qu'elle ait eu une position droite en ces matières, l'autre sur le Front National.


UN TORTIONNAIRE,

LA COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L'HOMME

ET LE FRONT NATIONAL



En janvier 2002, suite à la publication d'un livre de mémoires chez l'éditeur Perrin, Paul Aussaresses est condamné à 7 500 euros d'amende pour « apologie de crimes de guerre », et les deux éditeurs à 15 000 euros chacun pour « complicité d'apologie de crimes de guerre ». En avril 2003, le jugement est confirmé en appel et alloue en outre 1000 euros à chaque partie civile. La Ligue des droits de l'homme, le MRAP et l'association Action des chrétiens pour l'abolition de la torture, se voient allouer un euro de dommages-intérêts et 1500 euros.
En juin 2005, les éditeurs et la société des éditions Plon saisissent la Cour européenne des droits de l'homme en vertu d'un article de  la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En janvier 2009. La Cour européenne des droits de l'homme déclare recevable la requête des deux  éditeurs et de la société des éditions Plon, en vertu de l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, qui encadre la liberté d'expression. La France est condamnée à verser aux requérants la somme de 33 041 euros pour « dommage matériel » et 5 000 euros pour « frais et dépens »... Reposez en paix, Maurice Audin, Larbi Ben M'Hidi (qui fut – on a peine à le croire – pendu, une nuit et sans jugement, des mains du « général » Aussaresses), et toi Henri Alleg : l'Europe a pris soin de votre mémoire... à la manière de ceux qui l'ont ainsi construite, et aujourd'hui la soutiennent au nom des « valeurs de solidarité, des droits de l'homme, de la paix, et de la fraternité entre les peuples ».

L'avocat d'Aussaresses fut maître Gilbert Collard (qui fut président du comité de soutien de Marine Le Pen à l'élection présidentielle). Je ne lui ferai pas l'insulte de considérer qu'un avocat se commet nécessairement avec l'accusé qu'il défend. Ainsi, en son temps Jacques Vergès, pour l'honneur des avocats de la défense du monde entier, défendit Klaus Barbie, et d'autres personnages moralement indéfendables. Ce qui est intéressant, c'est ce que Gilbert Collard exprime sans même - semble-t-il s'en apercevoir : la fascination superficielle pour une pensée en apparente rupture avec les discours politiques conventionnels. Il est vrai qu'une pensée et des actes authentiquement révolutionnaires ont disparu du paysage politique depuis que le PCF développe des pensées de caniche et les stratégies politiciennes qui vont avec.

Le capitalisme ignore le respect des droits des peuples lorsqu'ils font obstacle à ses intérêts. Il peut alors avoir recours à un appareil d'état répressif, voire à des milices privées, comme aujourd'hui en Afrique du sud, ou en Hongrie. Dans notre pays, c'est le rôle éventuel que le capital a dévolu au Front national. Certes. Et on ne nous épargne pas en ce moment le coup bêlant des « valeurs », des « solidarités » des « exclusions », du «mariage pour tous », des « Roms », des «immigrés » (que les dernières villes communistes de l'ex- «ceinture rouge » excluent sans même le vouloir au nom de la « mixité sociale », tant leur pensée et leurs pratiques sont devenue molles). Et au repas de midi et demi, les petits perroquets savants sur France-Info qui répètent ce que leur ont suggéré papa-maman-journalistes ; et les mômes des collèges qu'on pique à la « tolérance » et à la « solidarité », jamais à la lutte, jamais à la révolte, jamais à la pensée radicale, jamais au combat...

Ce qu'incarne Gilbert Collard est autrement grave, sans même qu'il en ait conscience. Le Front national est en train de réussir ce que même – c'est dire - Sarkozy dans sa vulgarité politique n'avait pas su rêver : la recomposition dans une droite nouvelle, radicale et maline (eh oui : elle  subvertit nos idées !), de ce qu'il y a de plus réactionnaire dans le paysage politique français. Le roi est nu : il y a de la xénophobie et parfois du racisme dans les entreprises. On ne va quand même pas se le cacher ? La « banalisation » du FN (qui en soulage beaucoup à droite) n'épargne pas le PS : il  a tant fait pour le faire monter et « rendre la droite inéligible ». Plus généralement et plus profondément, nous allons devoir faire face à une recomposition chaotique et profonde du paysage réactionnaire de la France. Cela pourrait durer longtemps et avoir – si nous n'y prenons garde - des conséquences sociales, géopolitiques et idéologiques désastreuses.



Pascal Acot

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