La grève à la clinique du Pont de Chaume est donc terminée. Après 51 jours de grève, malgré l'intervention de deux médiateurs et des autorités de l'État, cette issue favorable semblait tellement incertaine. Un accord a pourtant été signé vendredi soir entre la direction et le personnel gréviste, mettant ainsi un terme à un mouvement qui fera date au niveau départemental. Lundi matin, les 120 salariés grévistes reprendront le travail. La CGT à la pointe du combat admet qu'il était temps que ce conflit s'arrête . Quant à la direction, elle n'a pas souhaité commenter cet accord, désirant désormais, nous a-t-elle confiés hier soir, «se tourner vers l'avenir. On souhaite un retour au travail dans des conditions les plus sereines possibles et dans l'intérêt collectif. La fin de ce conflit est une bonne chose».
Christophe Couderc: "Une vraie lutte des classes..."
Christophe Couderc, secrétaire CGT de la clinique du Pont de Chaumes revient sur le long combat mené par les salariés et cet accord arraché vendredi soir.
Comment avez-vous vécu ces 51 jours de grève ?
C'est du jamais vu, nous avons vécu un conflit aussi violent qu'au siècle dernier, une vraie lutte des classes. La direction a voulu nous briser, nous sommes debout. Nous ne les laisserons plus nous broyer. C'est la victoire du courage et de l'opiniâtreté des femmes.
Concrètement, qu'avez-vous obtenu lors de cette ultime négociation ?
L'attribution de congés supplémentaires liés à l'ancienneté et de jours pour enfant malade, la création de 3 postes d'aide-soignant, une organisation des services différentes, avec la présence d'un binôme infirmière – aide-soignante, l'annulation de la restructuration en cours, une augmentation de 9 à 30 €/mois pour les petits salaires, une revalorisation des SMIC au bout de 2 ans d'ancienneté contre 8 actuellement, une prime exceptionnelle de 400 €
Sur quoi avez-vous dû lâcher ?
la création d'un poste de brancardier et d'un poste d'agent de sécurité pour les urgences, une grille salariale plus ambitieuse.
Avez-vous obtenu une indemnisation pour vos jours de grève ?
Nous allons toucher 1/3 de notre salaire brut et nous pourrons poser des RTT ou récupérer des heures supplémentaires pour les 50 % des jours restants. Nous sommes loin du compte, la fin de l'année sera difficile.
Du côté de la CGT et des grévistes
Philippe Martinez : «Une belle leçon de dignité»
Philippe Martinez, secrétaire national de la CGT était hier présent sur le site de la clinique. «Ma venue, explique-t-il, était prévue avant qu'une solution au conflit soit trouvée. Je suis heureux d'être présent ce matin pour fêter la fin de ce long affrontement avec le groupe Vedici qui possède 82 cliniques en France. Il faut dénoncer le poids de plus en plus important du secteur privé dans la santé et le désengagement de l'état. La santé n'est pas une marchandise».
Lutte, solidarité, résistance…
Le secrétaire national de la CGT a ensuite pris la parole devant les salariés de la clinique : «Vous avez fait plier le monde de la finance, votre dignité n'a pas de prix, ce succès vous appartient, il n'y a que ceux qui ne luttent pas qui sont sûrs de perdre. Votre lutte, votre solidarité, votre résistance est un symbole pour le monde du travail, vous avez dit halte à la longue dérive du système de santé, vous avez affronté le Medef et les actionnaires simplement pour avoir les moyens de faire votre travail correctement. Une belle leçon de dignité !»
Muriel, Christel, Fanny, Delphine, Luz-Maria... et tous les autres
Muriel, Christel, Fanny, Delphine, Luz-Maria, ont été acclamées dans les pleurs par leurs collègues dès leur arrivée, un moment d'émotion palpable. Elles ont mené une grève de la faim de 10 jours qui a nécessité l'hospitalisation de Muriel. Que représente pour elles, la fin de ce conflit ? «Un soulagement, de la fierté, répondent-elles. Nous ne sommes pas plus exceptionnelles que toutes les autres. La solidarité et le soutien de nos collègues ont été déterminants. C'est la fin d'une tension et d'une souffrance pour nos conjoints et nos enfants qui sont fiers de nous. Nous sommes faibles physiquement et moralement mais nous ressortons grandies, nous avons fait reculer la finance». Elles ont connu des moments de doute, voire de détresse. «Il est difficile de voir passer son directeur qui tourne la tête, nous n'avons pas eu droit à un regard. De plus ils ont laissé les spots allumés jour et nuit, une vraie torture.»