Le Nicaragua sous dictature… du double standard et du copier-coller
Par son importance et l’incertitude qu’elle a engendrée, l’élection présidentielle du 8 novembre aux Etats-Unis a occulté le résultat et limité les commentaires sur le scrutin qui, deux jours auparavant, avait vu la victoire du sandiniste Daniel Ortega au Nicaragua. Toutefois, toutes tendances confondues, de la droite à la gauche (réelle ou supposée), l’appareil médiatique avait pris les devants en disqualifiant implicitement ou explicitement, sans nuances ni remise en perspective, cette réélection annoncée. Une unanimité qui laisse rêveur et devrait inciter à la réflexion.
Président sortant du Nicaragua, Daniel Ortega a été réélu pour un troisième mandat consécutif, le 6 novembre 2016, avec 72,5% des suffrages, loin devant les 15% de Maximino Rodríguez, candidat du Parti libéral constitutionnaliste (PLC, droite) [1]. Son parti, le Front sandiniste de libération nationale (FSLN), a conquis 71 des 92 sièges de l’Assemblée nationale. Alors que le Conseil suprême électoral (CSE) annonçait une abstention de 31,8 %, la coalition d’opposition du Front large de la démocratie (FAD) l’a estimée, sans citer aucune source identifiable, à plus de 70 % [2]. A qui se fier ?
En la matière, un simple rappel du passé permet d’avoir au moins une « petite idée » sur la question. Ayant assisté à l’élection précédente, déjà contestée à l’époque, qui, le 6 novembre 2011, se solda par une victoire du même Ortega, avec une majorité de 62 % des suffrages, nous pouvons affirmer qu’il avait incontestablement remporté ce scrutin [3]. Pourtant, arrivé en deuxième position avec 31 % des voix, le représentant du Parti libéral indépendant (PLI), Fabio Gadea, contesta sa défaite, prétendant avoir lui-même recueilli 62 % des voix (alors que tous les sondages lui avaient accordé environ 30 %). Alertant la « communauté internationale » (comprendre : les Etats-Unis et l’Union européenne) acquise à sa cause, il annonça une protestation massive et, pour le 3 décembre suivant, une manifestation de cent mille personnes dans les rues de la capitale Managua. Il en vint entre cinq et dix mille (sans présence d’un appareil massif de répression). Mais c’est la défense de leur cause que l’appareil médiatique international choisit de privilégier.
En 2008, déjà, lors d’élections municipales largement remportées par le Front sandiniste de libération nationale (FSLN) – 109 villes sur 153 –, le candidat battu pour la mairie de Managua, le banquier Eduardo Montealegre, hurla à la fraude et exigea un recomptage des votes. Pour son plus grand malheur, le CSE accepta. Dès lors, les libéraux optèrent pour ne pas assister à ce recomptage et n’apportèrent ultérieurement aucune des « preuves » censées sustenter leur accusation.
C’est donc avec la plus grande réserve qu’on accueillira la récente déclaration de la dirigeante du FAD, Violeta Granera : « Nous ne reconnaissons pas les résultats de cette farce et, avec la force de la volonté manifestée par le peuple du Nicaragua, nous déclarons ces élections nulles [4]. »
S’il est un commentaire revenu en boucle ces dernières semaines, avec un ensemble parfait, c’est bien celui-ci : trente-cinq ans après avoir renversé par les armes la dictature d’Anastasio Somoza, le FSLN n’est plus ce qu’il était. Quelle ébouriffante découverte ! Pour information : l’Union soviétique, l’Angola, l’Afghanistan, l’Iran, l’Irak, le Parti socialiste français, le prince Charles (qui alors épousait Diana), la télévision publique, Georges Brassens, l’Amérique latine en général, le Venezuela, l’Equateur et la Bolivie en particulier, l’auteur de cet article et ses lecteurs non plus ! Et l’on ajoutera, au risque de surprendre, que même la nostalgie n’est plus ce qu’elle était. [...]
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