Elle ne voulait pas se lancer. Elle aura finalement mis fin à deux décennies de gouvernement de droite dans la capitale espagnole. Manuela Carmena sera intronisée, samedi, nouvelle maire de Madrid, à la suite d'un accord entre les "indignés" d'Ahora Madrid - liste née de l'alliance entre Ganemos Madrid et Podemos - et les socialistes du PSOE. Avec 29 sièges (20+9), Ahora Madrid fait ainsi mieux que le Partido popular (21), qui gérait la ville depuis 24 ans. Il aura fallu moins de trois mois à cette ancienne magistrate de 71 ans pour séduire les électeurs madrilènes. L'un des moments forts de sa campagne ? Sa pique envoyée à son adversaire du PP, Esperanza Aguirre, lors d'un débat télévisé. "Je ne te comprends pas, Esperanza... Qu'après nous avoir fait tant de mal, tu veuilles encore gouverner. Tu as fait un mal terrible à la démocratie", a-t-elle lancé à l'ancienne ministre de 63 ans, également ancienne présidente du Sénat et présidente de la région de Madrid entre 2003 et 2012.
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Logement, emploi : 5 mesures phares pour ses 100 premiers jours
Née le 9 février 1944 dans une famille de commerçants madrilènes, elle dit avoir toujours pensé qu'il fallait "se battre pour un monde meilleur". Ce qu'elle a fait contre le franquisme lors de ses études de droit dans les années 1960. A cette époque, elle rejoint le Parti communiste pour "lutter contre Franco". Une décision qui lui vaut d'être expulsée de l'université de Madrid où elle fait ses études de droit. En 1977, deux ans après la mort du dictateur, elle échappe à un attentat de l'extrême-droite qui vise le cabinet d'avocats dans lequel elle exerce. Plusieurs de ses collègues trouvent la mort, l'Espagne est sous le choc.
Quatre ans plus tard, elle devient magistrate. Une nomination mal perçue par ses pairs. "Je ne peux pas te féliciter: tu es une femme, tu es une "rouge" et je n'ai aucune envie que tu sois dans le corps judiciaire", entend-t-elle de la parte de l'un de ses supérieurs. Elle est tour à tour juge d'instruction, juge d'application des peines, jusqu'à accéder au Tribunal suprême. La justice, un sentiment avec lequel elle souhaite diriger la ville. Manuela Carmena, qui se dit indépendante, a ainsi prévenu : elle veut être la maire de tous les Madrilènes. Pour ses 100 premiers jours de gouvernement, elle s'est donné comme objectif cinq mesures phares concernant le logement, l'arrêt de la privatisation des services publics, l'accès aux services de santé et l'emploi. Et pour cela, elle a d'ores et déjà annoncé qu'elle présidera elle-même les débats du Conseil municipal. Une mission que n'exerçaient pas ses deux prédécesseurs.