Il a rempli ce rôle historique avec bonheur à de nombreuses reprises, en 1936 en étant le fer de lance des luttes sociales victorieuses durant le Front Populaire, en organisant la Résistance armée contre les occupants Nazis et leurs alliés Pétainistes de 1940 a 44, en étant l’acteur essentiel des conquêtes sociales et politiques de la France libérée en reconstruction, en pesant de tout son poids contre les guerres coloniales et contre l’alignement de la France sur l’impérialisme occidental antisoviètique aux temps qu’on dit de "guerre froide".

Durant tout ce XXème siècle, les faux pas ne manquèrent pas : ils sont inhérents à tout organisme vivant. Ce fut ainsi le cas en été 1940 quand quelques dirigeants d’un PCF interdit et pourchassé dans un pays bouleversé par la défaite crûrent bon de demander la reparution légale de l’Humanité aux occupants allemands sur injonction de la diplomatie soviétique. Erreur majeure, réparée quelques mois plus tard, mais symptomatique d’une confusion entre les aspirations révolutionnaires et les intérêts particuliers d’un état, fut il socialiste.
La plupart du temps, les erreurs étaient le fruit des tentations électoralistes, carriéristes, opportunistes, toujours présentes quand un parti révolutionnaire agit au sein d’une " démocratie parlementaire ", au sein de laquelle le suffrage universel et les alliances qu’il implique lui apportent des lambeaux de pouvoir politique, notamment sur le plan local.
Ainsi, le PCF atténua fort dès 1937 ses mots d’ordre anticolonialistes pour ne pas déplaire à ses alliés socialistes et radicaux du Front Populaire (alors même qu’il dénonçait avec pertinence la " non intervention" du gouvernement Blum en Espagne livrée aux insurgés Franquistes avec l’aide d’Hitler et de Mussolini ).
Plus grave encore, les députés PCF en 1956 votèrent les " pouvoirs spéciaux " accordés à l’armée coloniale en Algérie, dans l’espoir fallacieux d’entraîner le gouvernement du Socialiste Guy Mollet à négocier avec les insurgés anticolonialistes. Ce qui n’aboutit qu’à y multiplier exactions et tortures.
Mais ces erreurs ponctuelles (et il y en eut bien d’autres) ne changeaient pas la nature profonde du PCF, suffisamment ancré dans les luttes de classe, suffisamment adossé à la classe ouvrière, pour corriger à chaque fois les dérives, après un temps d’hésitation.
Ainsi le vote malheureux des " pouvoirs spéciaux " n’empêcha pas le PCF d’être l’animateur essentiel des luttes populaires pour la paix en Algérie et contre l’OAS de 1957 à 1962. En 1969 encore,la candidature pour le PCF de Jacques Duclos aux Présidentielles prouva qu’on pouvait mener un combat électoral sans tomber dans les dérives opportunistes : Elle obtint 21,6 pour cent des voix, score inégalé depuis.
Le temps des dérives unitaires
C’est à partir de la décennie 70 que les tendances à l’opportunisme droitier, l’électoralisme et le carriérisme conquirent progressivement le PCF, ses directions nationales, départementales et locales, ses élus nationaux, départementaux, communaux, et ceux qui en dépendaient de façon directe ou indirecte, permanents du parti et syndicaux, voire salariés de collectivités locales, souvent promus pour leur capacité à obéir plus que pour leurs qualités d’analyse militante.
La raison essentielle de cette gangrène fut le choix de la stratégie dite " d’Union de la Gauche", la recherche constante d’alliances électorales permettant de conquérir des parcelles de pouvoir politique local et national, qui se concrétisa en 1977 dans un Programme Commun de Gouvernement avec Parti Socialiste et Parti Radical de Gauche. Démarche d’alliance qui ne pouvait déboucher que sur une allégeance au partenaire social-démocrate, seul capable d’assurer l’élection et la réélection de candidats PCF aux scrutins successifs.
L’accès aux pouvoirs devenait peu à peu le but premier du Parti, justifiant l’abandon progressif de pans entiers de son programme révolutionnaire, et son alignement sur les choix d’un PS dominateur décidé à utiliser ce partenariat pour laminer les Communistes à son profit. Les exemples de ces dérives opportunistes des dirigeants du PCF sont légion, trop nombreux pour être énumérés.
Il suffira de citer le soutien du PCF a Mitterrand comme candidat unique de la Gauche à l’élection présidentielle de1965, funeste erreur renouvelée en 1974, en cachant aux jeunes militants communistes qui l’ignoraient et allaient remplir ses meetings, le passé sulfureux de ce politicien, ordonnateur en 1957 des répressions, tortures et exécutions de militants anticolonialistes algériens quand il était ministre.
C’est dans le même état d’esprit d’allégeance opportuniste que le Secrétaire général du PCF annonça en 1976 à la presse l’abandon de la notion de "dictature du prolétariat" adoptée en 1920 en référence à la Révolution russe, sans débat entre militants, avec pour seule motivation de "ne pas effrayer les électeurs de Gauche" !

Mais l’exemple le plus flagrant de cette débandade idéologique vint en 1981 après l’élection de Mitterrand, quand la plupart des dirigeants du PCF se répandaient en discours enflammés et ridicules sur "la marche au Socialisme entamée par la France " parce que le Président avait eu la bonté de choisir quelques ministres PCF, et quand les mêmes dirigeants expédiaient en secret aux élus et militants locaux (dans le Val d’Oise par exemple) ce genre de directives : " Camarades, il faut calmer le jeu sur le terrain, nous sommes au Gouvernement ! ".1
La suite ici sur le site de l'ANC : http://ancommunistes.org/spip.php?article976
1- En Seine-Maritime, le même genre de directives fut adressé aux membres du secrétariat fédéral, convoqué en toute urgence par Roland Leroy, alors directeur de l'Humanité et membre du bureau politique.