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ACTION COMMUNISTE

 

Nous sommes un mouvement communiste au sens marxiste du terme. Avec ce que cela implique en matière de positions de classe et d'exigences de démocratie vraie. Nous nous inscrivons donc dans les luttes anti-capitalistes et relayons les idées dont elles sont porteuses. Ainsi, nous n'acceptons pas les combinaisont politiciennes venues d'en-haut. Et, très favorables aux coopérations internationales, nous nous opposons résolument à toute constitution européenne.

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Humeur

Chaque semaine, AC attribue un "roquet d'or" à un journaliste qui n'aura pas honoré son métier, que ce soit par sa complaisance politique envers les forces de l'argent, son agressivité corporatiste, son inculture, ou sa bêtise, ou les quatre à la fois.

Cette semaine, sur le conseil avisé de la section bruxelloise d'Action communiste, le Roquet d'Or est attribué  à Thierry Steiner pour la vulgarité insultante de son commentaire sur les réductions d'effectifs chez Renault : "Renault fait la vidange"...  (lors du 7-10 du 25 juillet).


Vos avis et propositions de nominations sont les bienvenus, tant la tâche est immense... [Toujours préciser la date, le titre de l'émission et le nom du lauréat éventuel].

 

 
4 avril 2016 1 04 /04 /avril /2016 09:26
 

Le projet de loi El Khomri correspond à la mise en œuvre d’une partie du projet du grand patronat français (le Medef). C’est à l’occasion de son Assemblée générale du 18 janvier 2000 que le Medef a décidé de lancer l’idée de la « refondation sociale ». Il ne veut plus de lois constitutives de droits pour les salariés, il veut généraliser la notion de « contrat » entre l’employeur et le salarié.

 

Par Jacques Nikonoff, professeur associé à l’Institut d’études européennes, Université Paris 8

Le 30 mars 2016

Le projet de loi El Khomri correspond à la mise en œuvre d’une partie du projet du grand patronat français (le Medef). C’est à l’occasion de son Assemblée générale du 18 janvier 2000 que le Medef a décidé de lancer l’idée de la « refondation sociale ». Il ne veut plus de lois constitutives de droits pour les salariés, il veut généraliser la notion de « contrat » entre l’employeur et le salarié.

Par ailleurs, dans le cadre du « Semestre européen », la Commission européenne publie des rapports par pays. Rappelons que le Semestre européen est un cycle de coordination des politiques économiques et budgétaires au sein de l’Union européenne (UE), à l’occasion desquels les États membres alignent leurs politiques économiques et budgétaires sur les règles et les objectifs arrêtés au niveau de l’UE. Il s’inscrit dans le cadre de la « gouvernance » économique de l’Union européenne. Ce cycle se concentre sur les six premiers mois de chaque année, d’où son nom. La Commission européenne a fait cette proposition en mai 2010, les ministres de l’Économie et des Finances l’ont adopté et introduit en septembre 2011. Le processus consiste à coordonner les politiques économiques et budgétaires de la zone euro, en lien avec le Pacte de stabilité et de croissance et la stratégie Europe 2020. Dans ce but, un calendrier d’intégration des budgets des États membres de l’UE au niveau européen a été mis en place en 2011 (le semestre européen). Concrètement, il s’agit de faire « dialoguer » la Commission, chargée du respect du pacte de stabilité et de croissance, et les États membres tout au long de leur processus d’élaboration budgétaire. Des prévisions économiques sont produites trois fois par an par la Commission qui, en janvier, présente un « Examen annuel de croissance » (EAC) pour chaque État membre. Cet EAC met au jour les « réformes » et les « efforts » à effectuer par ces pays. Il débouche sur l’établissement de priorités par le Conseil européen, transmises ensuite, en mars, aux États. En avril, ces derniers doivent élaborer à partir de ces priorités, un « programme de stabilité » qui est ensuite transmis à la Commission (comprendre un programme d’austérité. Celle-ci transmet alors en juin des recommandations pour chaque pays au Conseil européen qui les adopte en juillet. Dès lors, les États doivent intégrer ces recommandations dans leurs projets budgétaires pour l’année suivante. Le semestre européen correspond à une nouvelle étape dans le démantèlement de la souveraineté des États membres.

Pour en savoir plus :
http://www.consilium.europa.eu/fr/policies/european-semester/

Deux documents des institutions de l’Union européenne montrent qu’elles ont inspiré le projet de loi présenté par Madame El Khomri, ministre du Travail, et qu’elles agissent activement pour son succès. Il s’agit :

  • du communiqué de presse du 26 février 2016 de la Commission européenne présentant le « rapport sur la France » ;
  • des « Recommandations du Conseil » du 13 mai 2015.

La Commission européenne a publié le 26 février 2016 son analyse annuelle « des défis économiques et sociaux, auxquels font face les États membres de l’UE », à savoir les « rapports par pays ». Ces rapports sont un instrument destiné à suivre les « réformes » engagées (comprendre la mise en œuvre de politiques néolibérales). Ils servent de base au « dialogue » avec les États membres concernant leurs choix nationaux en vue de l’adoption de leurs programmes nationaux en avril et conduiront à la formulation, à la fin du printemps, des recommandations de la Commission par pays.

Étrangement, le rapport sur la France n’est disponible qu’en anglais. La charge symbolique est très forte, comment inciter au « dialogue » si une partie de la population, du fait de la barrière de la langue, ne peut accéder à des données, analyses ou recommandations concernant son propre pays ?

Ce rapport préconise la décentralisation de la négociation collective à l’échelle de l’entreprise et une diminution généralisée des dépenses sociales.

La Commission européenne constate avec gourmandise qu’un « glissement » s’est produit vers la décentralisation de la négociation collective. Le cadre introduit en 2004 par la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social (dite loi Fillon) a étendu la portée de la négociation collective aux entreprises moyennes. Les accords d’entreprise ou de branche ont été autorisés à déroger aux accords de branches ou interprofessionnels, même si les conditions sont moins favorables aux travailleurs. Néanmoins, regrette la Commission européenne, le principe de faveur, qui établit qu’une révision à la baisse des conditions d’emploi ne peut pas se produire, reste valable « pour le salaire minimum, les classifications, les mesures supplémentaires de protection sociale, les fonds interprofessionnels de la formation professionnelle ». On comprend que la Commission européenne va agir pour continuer la délocalisation vers l’entreprise de la négociation collective sur ces sujets.

Depuis que les dérogations aux accords de branche ou interprofessionnels ont été autorisées, la Commission européenne constate avec regret que les résultats ont été particulièrement faibles. Depuis 2013, seulement 10 accords d’entreprise ont été conclus (accords de maintien de l’emploi), couvrant moins de 2 000 travailleurs. Pour tenter de redresser la situation, la loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (dite loi Macron) a étendu la durée de ces accords à 5 ans et a introduit la notion de cause « réelle et sérieuse  » pour licencier les salariés refusant les termes de l’accord, réduisant de ce fait l’incertitude pour les entreprises dans les litiges avec leurs salariés.

À la suite du rapport Combrexelles de septembre 2015, la Commission européenne donne un coup de chapeau au gouvernement qui aurait ainsi manifesté « son intention de réformer progressivement le code du travail pour renforcer l’autonomie de négociation au niveau de l’entreprise » et annoncé qu’une loi serait présentée (le projet de loi El Khomri).

Le projet de loi El Khomri correspond à la mise en œuvre d’une partie du projet du grand patronat (le Medef)

La Commission européenne ne s’arrête pas aux encouragements à détruire le Code du travail, elle insiste également sur la nécessité de poursuivre la destruction du modèle social européen issu de l’après-guerre, reprenant ainsi toutes les exigences du grand patronat.

L’organisation sociale idéale, pour le Medef, est celle dans laquelle les entreprises pourraient définir les contenus des contrats de travail sans aucune contrainte, comme au XIXe siècle avec le contrat de louage où les ouvriers se présentaient en place de Grève… Démunis de tous droits individuels et collectifs, les salariés n’auraient plus aucun recours légal. Car placer le contrat au-dessus de la loi revient à remettre en cause le principe de la hiérarchie des normes juridiques. Selon ce principe la Constitution se place au sommet de notre architecture juridique. Tous les autres textes en découlent en formant une hiérarchie : les traités internationaux, les lois, les règlements… Un arrêté municipal, par exemple, reste subordonné aux principes généraux du droit et ne peut contrevenir aux stipulations d’un texte d’un niveau supérieur. Si la loi fixe le SMIC à 1 500 euros mensuels, aucun accord de branche ou d’entreprise ne peut aujourd’hui fixer un seuil inférieur. Le Medef veut pourtant obtenir la possibilité, avec l’appui de la Commission européenne, de signer des accords de branche ou d’entreprise qui fixeraient le SMIC à 1 000 euros par exemple pour les salariés de cette branche ou de cette entreprise… C’est ce qu’il exprime clairement quand il critique le système actuel qui « hiérarchise les règles sociales suivant le principe de la clause dite la plus favorable » (le principe de faveur). Le Medef a trouvé dans le Parti socialiste et le gouvernement Hollande-Valls un agent beaucoup plus efficace que le dernier gouvernement Sarkozy-Fillon qui n’avait pas osé aller si loin.

La « refondation sociale » engagée par le MEDEF est une tentative de coup d’État

En République, la souveraineté appartient au peuple, directement et par l’intermédiaire de ses représentants, les députés. Il leur revient de décider des conditions du travail, de sa protection et de sa promotion par le vote de la loi. Selon l’Article 34 de la Constitution, « La loi détermine les principes fondamentaux du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale. » Ces questions relèvent donc d’abord de la représentation nationale (le Parlement) – c’est-à-dire du champ politique – et ensuite des partenaires sociaux. La raison est simple. La représentation nationale, qui vote la loi, est l’émanation du peuple alors que les partenaires sociaux n’en représentent qu’une fraction. C’est ce que souhaite changer le Medef. C’est pourtant devant la loi, et uniquement devant la loi, que « tous les citoyens sans distinction » se trouvent égaux. Si la loi devenait seconde au regard du contrat, devant qui ou quoi seraient égaux les citoyens ? Par nature le contrat ne peut satisfaire au principe d’égalité, a fortiori lorsqu’il se contracte individuellement entre un salarié et un employeur.
Avec l’inversion de la hiérarchie des normes, le pouvoir d’édicter les règles sociales passerait au patronat, principalement le grand patronat, et plus précisément dans les bureaux du Medef. Seul à décider, il pourrait ainsi accroître l’insécurité, la flexibilité et la précarité. Les temporalités sociales seraient alignées sur les temporalités du marché.

Dans ses « recommandations spécifiques » (Specific recommendations - CSRs), la Commission européenne demande à la France de :

  • identifier les « sources d’économies sur la Sécurité sociale, les collectivités locales, les retraites complémentaires, les retraites de base grâce aux encouragements pour travailler plus longtemps »,
  • poursuivre les « progrès substantiels » obtenus dans la baisse du coût du travail,
  • lutter contre les « rigidités » du marché du travail,
  • « modifier les modalités de fixation du salaire minimum » (le SMIC) car en 2015 il a augmenté de 0,6% de plus que l’inflation à cause de l’indexation automatique sur les salaires réels alors que le chômage continuait d’augmenter,
  • réformer le code du travail pour encourager les entreprises à embaucher des CDI,
  • faciliter les dérogations accordées aux entreprises notamment pour l’aménagement du temps de travail,
  • réformer le système d’assurance chômage pour qu’il revienne à l’équilibre financier et qu’il encourage mieux les chômeurs à retourner au travail.

La Commission regrette que la France ait fait « des progrès limités pour faciliter les dérogations à la loi au niveau de l’entreprise. La réforme du code du travail devrait permettre une meilleure prise en compte du niveau de l’entreprise et de la branche pour les dérogations à la loi. »

La Commission européenne veut accélérer la baisse des salaires réels en France

Le salaire réel correspond au pouvoir d’achat du salaire nominal, c’est-à-dire la quantité de biens et de services qu’un agent économique peut acheter avec son salaire nominal (celui que son employeur lui verse sur son compte en banque).

Motif : la récente décélération des salaires réels en France resterait « insuffisante pour rattraper le retard entre le coût du travail et le ralentissement de la croissance de la productivité ».

La Commission européenne donne les chiffres suivants : entre 2008 et 2012, le revenu par salarié a augmenté de 2,5% en moyenne par an, alors que la croissance du PIB moins l’inflation était autour de 1%. Le gain de 1,5% pour les salariés serait donc extravagant. D’où le principe suivant que l’on peut déduire de cette déclaration de la Commission européenne : les salaires ne doivent pas permettre une amélioration du pouvoir d’achat.

La Commission européenne ne veut pas entendre parler d’augmentation du SMIC

Pour elle, « l’augmentation du SMIC induit une augmentation des salaires pour toutes les catégories de travailleurs, particulièrement pour les ouvriers et employés. » La Commission européenne ajoute « en période de faible inflation, les règles d’ajustement du salaire minimum (le SMIC) peuvent être une source de rigidité des salaires depuis qu’elles sont partiellement indexées sur l’évolution des salaires réels. Le processus de fixation des salaires contribue ainsi aux pressions salariales. » On peut ainsi déduire un autre principe imaginé par la Commission européenne : non seulement les salariés ne doivent pas connaître d’augmentation de leur pouvoir d’achat (progression du salaire supérieure à l’inflation), mais le salaire minimum (le SMIC en France) ne doit jamais augmenter.

La Commission européenne veut diminuer les prestations de Sécurité sociale

Pour elle, « Le coût du travail en France reste parmi les plus élevés de l’UE, essentiellement du fait des cotisations sociales élevées payées par les employeurs, la France se place juste après la Belgique, le Danemark, la Suède, le Luxembourg. Ce rang n’a pas évolué depuis 10 ans, malgré la décélération du coût du travail observée depuis 2012 ». Ce coût du travail serait « élevé principalement à cause de la fiscalité comptant pour plus de 30% de l’heure travaillée, comparé à une moyenne de 24% dans l’UE. »

La Commission se réjouit néanmoins que des « mesures ont été récemment introduites pour réduire le fardeau fiscal sur le travail » : réduction fiscale dans le cadre du CICE de décembre 2012 ; diminution des cotisations sociales des employeurs pour la Sécurité sociale dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité de janvier 2014. « Au total ces mesures vont baisser la fiscalité patronale de 1,5% du PIB (30 milliards d’euros) entre 2013 et 2017 ». On doit contester la notion de « fardeau fiscal » pour les entreprises, elles devraient au contraire être fière de contribuer ainsi aux biens communs. Le gouvernement devrait même publier la liste des meilleurs contributeurs ayant payé le plus d’impôts.

La Commission européenne veut réduire les indemnités des chômeurs

Elle constate la détérioration de l’équilibre financier du système d’assurance chômage qui, malgré la Convention d’assurance chômage entrée en vigueur le 1er juillet 2014, reste insuffisante pour réduire son déficit. En octobre 2015 les projections de déficit étaient estimées passer de 21,3 milliards d’euros en 2014 à 25,8 milliards d’euros en 2015 et 29,4 milliards en 2016. Pour l’UE, « La conception du système d’allocations chômage réduit les incitations à retourner au travail ». Hélas, la Commission européenne est restée muette sur les conséquences du déficit financier des familles de chômeurs.

On peut déduire un troisième principe de ces déclarations et de ces silences : il faut baisser les indemnités des chômeurs, autrement dit les affamer, pour les obliger à chercher du travail.

Le document concerné s’intitule « Recommandations du Conseil COM(2015) 260 final », daté du 13 mai 2015. Il concerne le programme national de réforme de la France pour 2015 et porte avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2015. Ce texte a été soumis par le gouvernement français, en application de l’article 88-4 de la Constitution, à l’Assemblée nationale et au Sénat le 21 mai 2015.

Les « recommandations » du Conseil sont ainsi devenues le programme du gouvernement français : « À la lumière des résultats du bilan approfondi de la Commission et de cette évaluation, le Conseil a examiné le programme national de réforme de la France et son programme de stabilité. Ses recommandations formulées en vertu de l’article 6 du règlement (UE) nº1176/2011 se reflètent dans les recommandations figurant aux points (1) à (6) ci-dessous. RECOMMANDE que la France s’attache, au cours de la période 2015-2016 : » On trouve alors deux catégories de recommandations : celles qui portent sur la destruction du Code du travail, celles qui portent sur la destruction d’autres éléments de la protection sociale.

La Commission européenne regrette que « les réformes menées récemment n’ont donné aux employeurs que peu de possibilités pour déroger aux accords de branche. Cela limite la capacité des entreprises à moduler leurs effectifs en fonction de leurs besoins. Il conviendrait d’accorder aux branches et aux entreprises la possibilité de déterminer de façon flexible, au cas par cas et après négociations avec les partenaires sociaux, s’il y a lieu de déroger à la durée légale du travail de 35 heures par semaine. La loi portant création des accords de maintien de l’emploi n’a pas produit les résultats escomptés. Très peu d’entreprises ont fait usage des nouveaux dispositifs permettant un assouplissement des conditions de travail dans le cadre d’accords d’entreprise. Ce dispositif devrait être revu afin de donner plus de latitude aux entreprises pour adapter les salaires et le temps de travail à leur situation économique.

On retrouve cette analyse dans sa recommandation n° 6 : « réformer le droit du travail afin d’inciter davantage les employeurs à embaucher en contrats à durée indéterminée ; à faciliter, aux niveaux des entreprises et des branches, les dérogations aux dispositions juridiques générales, notamment en ce qui concerne l’organisation du temps de travail ; à réformer la loi portant création des accords de maintien de l’emploi d’ici à la fin de 2015 en vue d’accroître leur utilisation par les entreprises ; à entreprendre une réforme du système d’assurance chômage afin d’en rétablir la viabilité budgétaire et d’encourager davantage le retour au travail. »

On comprend donc que c’est la fin programmée des 35h et l’accentuation de la flexibilité des salaires et des horaires, autrement dit travailler plus pour gagner moins. L’incitation à embaucher davantage en contrats à durée indéterminée ne doit pas faire illusion. Comme la flexibilité des horaires et des salaires va croître, le CDI formel deviendra un CDD réel. Tel est l’objet du projet de loi de Madame El Khomri.

Ralentir « considérablement » la croissance des dépenses de Sécurité sociale

Pour la Commission européenne « Il est impossible de dégager à court terme d’importantes économies sans ralentir considérablement la croissance des dépenses de sécurité sociale, qui ont représenté 26% du PIB en 2014, soit près de la moitié des dépenses totales du secteur public. Des économies de 11 milliards d’EUR sur les dépenses de santé sont prévues pour 2015-2017, mais des efforts supplémentaires seront nécessaires pour limiter les hausses de dépenses dans ce domaine. Il est notamment possible de renforcer encore la mise en œuvre des politiques de maîtrise des coûts dans le domaine des prix des médicaments et des dépenses hospitalières. »

Résultat prévisible : diminution des remboursements des médicaments, des consultations et des hospitalisations qui frapperont plus particulièrement les ménages les plus en difficulté, diminution des embauches dans la fonction publique hospitalière.

Baisser les retraites

Pour la Commission, « Le déficit du système de retraite pourrait continuer à se creuser dans les années à venir et les réformes des retraites menées précédemment ne suffiront pas à le combler. En particulier, le déficit imputable aux régimes des agents de l’État et des salariés des entreprises publiques continue de peser sur le déficit global du système de retraite. »
Conclusion : des mesures de diminution du montant des retraites devront encore être prises.

Étrangler les collectivités locales

Pour la Commission « La France a entrepris de réformer ses collectivités locales en vue d’améliorer l’efficacité du système. Elle devrait continuer à mettre en œuvre la réduction prévue des dotations de l’État et renforcer le contrôle des dépenses des collectivités locales moyennant un plafonnement de l’augmentation annuelle des recettes fiscales de celles-ci, en tenant compte des plafonds qui s’appliquent déjà à un certain nombre d’impôts locaux. Des mesures sont également nécessaires pour maîtriser la hausse des dépenses de fonctionnement des collectivités locales. »
Résultat prévisible : diminution des embauches dans la fonction publique territoriale, diminution des subventions aux associations, coupes dans les dépenses sociales.

Baisser le coût du travail

Pour la Commission « Des mesures ont été prises pour réduire le coût du travail et améliorer les marges bénéficiaires des entreprises, notamment le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi de 20 milliards d’EUR et l’allègement des cotisations patronales de 10 milliards d’EUR supplémentaires prévu dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité. Ces deux mesures, qui représentent 1,5% du PIB, devraient contribuer à combler l’écart entre la France et la moyenne de la zone euro concernant le coin fiscal sur le travail. Leur mise en œuvre devrait se poursuivre en 2016 mais, compte tenu de leur coût élevé pour les finances publiques, il est important d’évaluer leur efficacité au niveau des entreprises. »
Résultat prévisible : de nouvelles subventions publiques aux entreprises privées.

Casser le mécanisme de fixation du salaire minimum

Pour la Commission il faut « tenir compte des rigidités affectant le marché du travail et le marché des produits, et tout spécialement celles affectant les salaires. Le coût du salaire minimum reste élevé si on le compare à celui des autres États membres. Le salaire minimum continue d’évoluer d’une manière qui n’est pas propice à la compétitivité et à la création d’emplois. De plus, dans un contexte d’inflation faible, son indexation automatique pourrait conduire à des hausses de salaires supérieures à ce qui est nécessaire pour préserver le pouvoir d’achat. »

Pour l’instant le gouvernement n’a pas encore osé s’attaquer à ce sujet.

Affamer les privés d’emploi

Pour la Commission européenne « La dégradation persistante de la situation sur le marché du travail a affecté le système d’assurance chômage, au point de remettre en cause la viabilité du modèle. La nouvelle convention d’assurance chômage, qui est entrée en vigueur le 1er juillet 2014, est insuffisante pour réduire le déficit. Les différentes mesures mises en place ont permis d’économiser 0,3 milliard d’EUR en 2014. D’après les estimations, elles réduiront le déficit de 0,8 milliard d’EUR supplémentaire en 2015, le faisant passer de 5,2 milliards d’EUR à 4,4 milliards d’EUR, et la dette du système augmenterait encore pour s’élever à 25,9 milliards d’EUR. Des mesures structurelles sont nécessaires pour garantir la viabilité du système. Les conditions d’éligibilité, la dégressivité des allocations et les taux de remplacement pour les salaires les plus élevés devraient être réexaminés. »
Tout le monde aura compris que « réexaminer » la dégressivité des allocations chômage et les taux de remplacement signifie les abaisser.

Tout ceci converge dans les recommandations n°2 et n°3 :

2.- à accentuer les efforts visant à rendre efficace la revue des dépenses et à recenser les possibilités d’économies dans tous les sous-secteurs des administrations publiques, et notamment aux niveaux de la sécurité sociale et des collectivités locales ; à prendre des mesures pour limiter l’augmentation des dépenses de fonctionnement des collectivités locales ; à prendre des mesures supplémentaires d’ici à mars 2016 pour ramener le système de retraite à l’équilibre, notamment en s’assurant que la situation financière des régimes de retraite complémentaire soit viable à long terme ;

3.- à maintenir les réductions du coût du travail découlant du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et du pacte de responsabilité et de solidarité, notamment en les mettant en œuvre comme prévu en 2016 ; à évaluer l’efficacité de ces dispositifs en tenant compte des rigidités du marché du travail et du marché des produits ; à réformer, en concertation avec les partenaires sociaux et conformément aux pratiques nationales, le système de formation des salaires pour que ceux-ci évoluent au même rythme que la productivité ; à veiller à ce que les évolutions du salaire minimum soient compatibles avec les objectifs de promotion de l’emploi et de la compétitivité ;

L’Union européenne impose des politiques d’austérité (notamment des « réformes structurelles du marché du travail ») qui consistent à affaiblir les droits et les protections des salariés face aux risques sociaux. L’exemple emblématique est celui de la Grèce avec un double résultat : très positif pour les créanciers qui ont recouvré leurs capitaux avec profits ; très négatif pour la population qui est frappée d’un recul social invraisemblable. Ces politiques empêchent la reprise de l’emploi et, à terme, le remboursement lui-même de la dette publique.

L’euro interdit l’ajustement des monnaies par le taux de change et impose la « compétitivité » par la baisse des salaires et la dérèglementation du travail, c’est-à-dire une concurrence acharnée entre pays, dont les salariés font les frais, alors que l’UE avait pour ambition affichée la coopération. La lutte contre la loi El Khomri, pour être victorieuse, doit intégrer la nécessité absolue de sortir de l’euro et de l’Union européenne, unilatéralement et sans préavis.

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4 avril 2016 1 04 /04 /avril /2016 09:23
Le soir du 30 mars à Tolbiac...
Amnésie européiste ?
Par Jean Lévy

dimanche 3 avril 2016, par Comité Valmy

 

Le soir du 30 mars à Tolbiac

Cela fait chaud au cœur : près d’un millier de jeunes étudiants et lycéens, pleins d’enthousiasme, réunis à Tolbiac, le soir du 30 mars 2016, contre la loi El Khomri, dite "loi travail".

Rassemblés, pour certains depuis le 9 mars, beaucoup de jeunes les ont rejoints à l’occasion des AG et des manif’s qui se succèdent, semaine après semaine, aux côtés des salariés en première ligne contre le projet de loi gouvernemental, socialement liberticide.

Ils se souviennent de la rude bataille gagnée en 2006 contre le CPE. Par leur multitude et leur détermination commune, travailleurs, lycéens et étudiants, ont alors imposé le retrait pur et simple de la loi, infligeant au gouvernement Chirac-De Villepin une défaite en rase campagne.

D’autres ne manquent pas d’évoquer mai 68, l’ambiance d’alors, les mots d’ordre libertaires écrits à la hâte et placardés dans les amphis, les libertés prises avec le sombre quotidien, des vacances pour l’esprit, un instant libéré.

Ce printemps 2006 va-t-il être un "remake" des souvenirs héroîques ?

Le climat qui règnait ce 30 mars à Tolbiac le laisserait penser.

Les mobilisations ouvrières et de jeunes qui se succèdent dans le pays depuis le 9 mars, plus puissantes, semaine après semaine, elles annoncent, pour les temps prochains, un climat de grande marée.

Mais, il ne faut pas se le cacher, la bataille qui s’annonce ne sera pas une promenade de santé.

Pour la gagner, faut-il encore mesurer les forces du capital qui se dressent contre notre peuple et qu’il faut battre. Et faire l’inventaire des moyens et la stratégie de ceux que nous combattons. Et pas seulement le gouvernement PS, mais aussi et surtout ses commanditaires.

Car Hollande, Valls et Macron ne sont que les fondés de pouvoir de l’oligarchie, les marionnettes du capital globalisé, comme l’étaient hier les Sarkozy, les Fillon, les Juppé. L’oligarchie, c’est le pouvoir qui détient à son profit les moyens de production et d’échange volés à la Nation, et qui s’est payé l’ensemble des grands médias au service de sa publicité.

Voilà qui se dressent face à nous et qu’il faut connaître.

Mais soyons plus précis. Depuis des décennies, il n’y a plus de capital strictement hexagonal. En France, le capital financier n’a pas de patrie. Pour sa survie, il s’est mondialisé. Et, en premier, européanisé. Car, par tradition, il se met sous la coupe du plus puissant, le capital allemand. Comme en 1940, il "collabore", comme fidèle second.

Pour générer des profits plus amples, ils ont mis en place ensemble un espace plus vaste que le territoire national : l’Union européenne. Plus de frontières, plus de douane, plus de droits à payer. Et une main d’œuvre robotisée au meilleur marché.

D’où les oukases bruxellois infligeant toujours plus d’austérité, des droits sociaux réduits à zéro. N’est-ce pas leur objectif en essorant le Code du Travail ?

Nous voici donc revenus au point de départ : la loi El Khomri !

Pour se mettre plus efficacement en ordre de bataille, n’aurait-il pas fallu à Tolbiac, l’autre soir, rappeler ces vérités, pas un instant abordées ?

Jean LEVY
Membre du bureau du Comité Valmy
31 mars 2016

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4 avril 2016 1 04 /04 /avril /2016 02:51
31 mars : la vague montante
vendredi 1er avril 2016
par  Charles Hoareau

 

 

Combien étions-nous ce jeudi 31 mars dans toute la France ?
Evidemment entre le ministère de l’Intérieur et les organisations qui appelaient à manifester les chiffres varient. A Marseille la préfecture de police a même atteint un sommet dans le domaine du grotesque.
Alors que les organisations annonçaient le nombre impressionnant de 120 000 manifestants, il s’est trouvé quelqu’un en préfecture pour annoncer sans rire le chiffre de 11200 !
Et pourquoi pas 11207 pour être encore plus soi-disant précis dans le ridicule !!!
Ils n’ont encore compté que les chauves à lunettes ?

Mais il y a une donnée sur laquelle tout le monde est d’accord et la presse le souligne ce matin : que l’on prenne les chiffres du pouvoir ou ceux des organisations le constat est le même : nous étions dans les rues de France le double du 9 mars.
Autrement dit les manoeuvres en recul du gouvernement, le soutien appuyé de la CFDT (dont quelques organisations étaient d’ailleurs présentes dans les manifestations) n’y ont rien fait : la vague est montante.

Hier à Marseille ce qui frappait c’est à la fois la force des professions et entreprises représentées et à ce titre outre les portuaires particulièrement nombreux on remarquait la force historique de la délégation des salarié-e-s d’Eurocopter, mais aussi la grande diversité des entreprises présentes avec certaines d’entre elles pour qui c’était la première manifestation et avaient fait faire pour l’occasion des banderoles neuves.

Dans ces dernières le mouvement n’en est qu’à ses débuts et la marge de progression n’en est que plus forte. Et il le faudra car pour le moment le gouvernement ne va pas reculer pour deux raisons fondamentales.

- D’abord pour des raisons de politique politicienne, les seules que souligne généralement la presse. Le gouvernement qui vient de se prendre une gamelle sur la déchéance de nationalité ne veut pas apparaître comme un gouvernement de l’à peu près et de l’indécision. Valls, admirateur de Clémenceau, veut donner une image de fermeté. Une autre version d’une raffarinade célèbre : « ce n’est pas la rue qui gouverne »

- Il y a ensuite une raison encore plus fondamentale : ce gouvernement ne peut pas, ne veut pas se mettre en délicatesse avec l’Union Européenne qui lui a enjoint de faire cette réforme, qui entre bien dans sa logique de pressurer une à une les classes ouvrières nationales des pays de l’union.
C’est une question de classe : obéir au capital ou s’affronter. Le gouvernement a choisi de se soumettre voire d’anticiper les désirs de ses maitres.
Nous nous avons choisi de nous battre non seulement pour le retrait de la loi mais aussi pour faire avancer nos propositions.

Aussi forte fut la journée du 31 mars elle ne suffira pas. On va donc continuer :
- Dans les quartiers populaires confrontés au chômage de masse et à la précarité et qui ont besoin d’emplois, de réindustrialisation, de services publics et non de mesures destinées à les mettre à la merci du grand patronat
- Dans les entreprises où nombre d’organisations syndicales vont agir pour que partout le plus haut niveau possible d’action avec la plus forte participation possible de salarié-e-s.
- Dans tous les lieux où se rassemble la jeunesse afin qu’elle ne soit pas une génération sacrifiée

De grèves en manifestations, de mobilisations diverses en mouvement général, nous sommes partis pour durer.
Durer pour gagner et faire enfin reculer le capital.

Charles Hoareau

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4 avril 2016 1 04 /04 /avril /2016 01:49
RASSEMBLEMENT CONTRE LA LOI TRAVAIL LE 9 AVRIL A DIEPPE
Déclaration du Comité Général de l’Union Locale CGT
de la Région Dieppoise

 

Dieppe le 1er avril 2016

Le 31 mars, pour exiger le retrait du projet de loi El Khomri-Valls, nous étions 3 000 dans les rues à Dieppe.  Cette étape supplémentaire s’est concrétisée par la mobilisation, selon les endroits, de quelques grévistes à des blocages complets de la production et avec une participation plus importante encore que lors des mobilisations précédentes.

Les salariés, du public comme du privé, les jeunes, les privés d’emploi et les retraités représentaient plus de 45 entreprises et collectivités de l’agglomération.

SNCF Dieppe, Véolia, Schneider, JC Decaux France, Traiteur Ali Baba, Territoriaux de Dieppe, Sika Gournay, Territoriaux Arques. Super U Serqueux, Danone, MGI Coutier, Autoliv , Pompiers Dieppe, Hôpital Dieppe, Syndicat Mixte du Port de Dieppe, SPIC Construction, ERDF Dieppe, EDF Paluel, EDF Penly, FAPT 76, Nestlé, DIRNO, Alpine, Carrefour, Carrefour Market, Normival, TTHA Compagnie, Association Foyer Duquesne, Pôle emploi Dieppe, Davigel, Gévelot (52 grévistes la production quasi bloquées),Tati, Toshiba, CAF, CPAM, URSAFF, Finances Publiques, Plastuni, Conseil départemental, AMCM Usinage, Freemach, PCI, OPAD, STUD , Nuvia, Hôpital, Grugny, Dakin, Cégelec, Rousseau Batiment...

Sur le département, ce sont 42500 manifestants qui ont exigé le retrait de ce projet de loi « Travail », ni négociable, ni amendable. A Rouen : 25 000 manifestants, au Havre : 15 000, à Lillebonne : 700, à Fécamp : 1 000, à Eu : 800 manifestants

Alors que, partout en France, c’est plus d’un million de manifestants qui a démontré, dans l’unité, cette exigence.

Et que répond le gouvernement ? Le président F. Hollande, depuis Washington, répond ce vendredi matin 1er avril, que la CGT multiplie par 4 le nombre de manifestants car elle est en difficulté.

Nous, CGT, affirmons que le gouvernement et le patronat divisent le nombre de manifestants et de grévistes par 10 parce qu’il sait notre détermination collective pour imposer le retrait de projet de loi ultra-réactionnaire !

Les mensonges présidentiels et le dispositif policier contre les jeunes et le droit de manifester ne feront pas reculer notre mobilisation.

Les organisations syndicales CGT, FO, Solidaires, FSU, UNEF, FIDL ont réaffirmé que les pouvoirs publics doivent garantir le droit à manifester, à se réunir, à s’organiser, tout en assurant la sécurité des manifestants. Nous y veillerons collectivement, à Dieppe aussi !

Le retrait de cette loi scélérate VALLS-El KHOMRI, nous sommes plus que jamais déterminés, avec tous nos syndiqués, à l’imposer.

Ce retrait serait un résultat formidable qui ouvrirait la voie au combat :

  • Pour toutes nos revendications et les propositions de la CGT
  • Pour avancer vers de nouvelles conquêtes sociales

Aussi, nous décidons d’organiser des actions nécessaires, dès les 5 AVRIL avec des distributions et le 9 AVRIL UN GRAND RASSEMBLEMENT A 14H30 LIEU DIT DE LA FONTAINE QUAI HENRI IV A DIEPPE, pour poursuivre la construction de la mobilisation indispensable.

Comme le dit le communiqué : « Si le gouvernement ne répond pas, les organisations syndicales CGT, FO, FSU, Solidaires, UNEF, UNL, FIDL resteront déterminées à poursuivre et à amplifier la mobilisation pour obtenir le retrait du projet de la loi travail et à conquérir de nouveaux droits sociaux y compris par les manifestations et la grève interprofessionnelle. »

 

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3 avril 2016 7 03 /04 /avril /2016 21:37

sur Info-Chalon

A Bourbon-Lancy, Chalon sur Saône, Louhans, Le Creusot et Mâcon.

Photo Info-chalon.com

Lire le communiqué de la CGT ci-dessous

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3 avril 2016 7 03 /04 /avril /2016 13:31

03/04/2016 - Pierre Largesse - Sur le site de l'IHS CGT 76

L’HOSTALITE PATRONALE AU DROIT du TRAVAIL

Par Pierre Largesse

Précédée d’une enquête parlementaire, la loi de 1841 limitant le travail des enfants est la première brèche dans le libéralisme intégral. Le Code Civil et le Code Pénal sont la loi. Jusqu’alors, le patronat avait un pouvoir absolu dans « son » entreprise. Des industriels-députés, s’y opposent : « le travail et le salaire résultent d’un contrat librement consenti entre le patron et son salarié ».
A la fin du XIXe siècle c’est grâce au combat des syndicalistes, des socialistes (pour une nouvelle société), des républicains de gauche (pour attacher les ouvriers à la République) que des lois sont votées. Le patronat dans la presse qu’il possède, dans les Chambres de commerce, s’y opposera avec pugnacité.
En 1898, au sujet de la loi des Trois-Huit, le Journal d’Elbeuf écrit « Quel besoin la loi a-t-elle de venir fourrer son nez pointu et biscornu dans les heures de sommeil ? C’est une théorie de la pire espèce, nuisible aux ouvriers, parce que des meneurs fainéants et débauchés l’auront fait admettre, vous serez en droit d’empêcher un ouvrier de travailler plus de huit heures ! Ce serait pour la classe ouvrière le commencement d’une misère épouvantable. »
En 1887, des manufacturiers qui obligeaient leurs tisserands à chômer (sans indemnité), ou à faire des heures supplémentaires, argumentent ainsi « La rapidité des communications internationales a modifié considérablement les conditions générales du commerce. Les délais de livraison sont tellement limités qu’il faut augmenter la production ou refuser les commandes. » En 1900, le vœu est exprimé qu’il soit « laissé à l’industriel et comme il l’entendrait, le crédit d’heures de travail qui lui est alloué pour une semaine" (de 66 heures). Le concept de « flux tendu » que nous croyons moderne, est déjà là. En 1903 l’Union des Syndicats Patronaux du Textile va également dans le sens de la tolérance laissée au patron dans l’organisation du travail.
En 1901, la Chambre d’Elbeuf s’exclame « Bien souvent les lois dites ouvrières présentent le caractère de lois de combat, et non des lois de conciliation. Toujours le patron et l’ouvrier sont considérés comme des adversaires, et l’on oublie que le patronat doit, au contraire, être considéré comme son conseiller, son protecteur et son guide (…) elles arrivent à surexciter les passions, à décourager les chefs d’industrie, à envenimer les rapports avec les ouvriers et finalement à la ruine et à la fermeture de l’entreprise. »
Malheureusement, tous les travailleurs ne s’opposent pas d’emblée à ces arguments. Le débat social s’inscrira dans la longue durée de l’histoire car, comme l’écrit Michel Pigenet dans une belle formule, pour les salariés « Il s’agit de lutter contre les charmes trompeurs de l’égoïsme individuel. »
Le patronat argumente sur d’autres thèmes : sur l’intérêt bien compris du salarié lui-même de s’opposer au Code du travail (1910),: sur la liberté individuelle, sur la moralité, car les femmes, enfants, adolescents qui, ne travaillent pas, seront « soumis à des influences funestes » ; par l’antiparlementarisme (demande de cesser de légiférer à tout propos), handicap de l’économie française « Il ne serait pas juste que nous nous trouvions dans un état d’infériorité par rapport aux fabricants allemands » ; (argument fort en 1887).
Les conflits du travail se multipliant, un projet de loi est déposé en 1899 visant à organiser et réglementer l’arbitrage obligatoire, à l’élection de délégués ouvriers. L’opposition patronale est vive : « Toutes les fois qu’une question a pu être traitée directement entre le patron et l’ouvrier, l’entente a été généralement facile. Il n’en a pas été de même quand sont intervenus des tiers n’ayant d’autre but que de produire leur personnalité, de se créer par leur intervention des titres à un mandat politique, et de se faire ainsi un marchepied pour leur ambition. » (14 janvier 1901).
La loi sur les accidents du Travail (1898) provoque un tollé, comme la création du Conseil supérieur du travail (1899) ou celle sur l’hygiène et la sécurité (1903).
En 1917, l’institution des délégués d’atelier dans les usines pour éviter des grèves ; en 1919, celle des premières conventions collectives ne dureront qu’un temps, face à l’opposition de la Confédération patronale (CGPF) comme à celle des patrons des petites entreprises.
La CFTC elle-même après sa création (1919) est visée. Ayant eu l’audace de réclamer l’institution d’Allocations Familiales, les patrons du Textile Roubaix-Tourcoing iront jusqu’à déposer une plainte au Vatican contre le syndicat chrétien !
Sur la nécessité de créer des congés payés annuels, les Chambres de commerce suivant celle de Douai (1930) considèrent que « les conditions de l’ouvrier dans l’industrie sont actuellement parfaitement salubres et ne nécessitent aucunement la période de détente nerveuse appelée congé, qui est nécessaire aux cadres et aux employés et demandent que la proposition de loi soit rejetée par le Parlement ».
Les conquêtes sociales de 1936 sont bien connues. Triste période pour le patronat ! Par contre dès novembre 1940 le directeur de la principale usine drapière d’Elbeuf s’exclame : « Comment n’aurais-je pas profité de cette magnifique occasion pour essayer de réaliser enfin une idée corporative qui m’était chère depuis de nombreuses années ! Nous devons aider à l’accomplissement de l’œuvre entreprise par le Maréchal dans le domaine social ». C’est la mise en place des syndicats professionnels français préconisés par le colonel de la Roque. Il a en mémoire les grèves de 1936, celle du 30 novembre 1938, revanche patronale où les délégués d’atelier grévistes ont été licenciés. Ernest Blin lui-même, pourtant écarté par l’aryanisation, adhère aux discours de Pétain sur « les mauvais bergers » et pour « haïr le mensonge qui nous a fait tant de mal ».

A la lumière de l’actualité, ces quelques exemples (développés dans des travaux précédents) démontrent la permanence de la rhétorique patronale sur le Code du travail et sur les conquêtes sociales.

3 avril 2016

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3 avril 2016 7 03 /04 /avril /2016 01:47

Qu'est-ce que la multinationale Lafarge ?

C'est une multinationale qui a bâti son empire sur le travail des ouvriers français.  Elle est créée en 1833 par le cimentier Lafarge.  Elle fournira le chantier du canal de Suez. 

Aujourd'hui,"La société produit et vend dans le monde entier principalement du ciment, des granulats et du béton prêt à l'emploi. Lafarge a développé des ciments spéciaux et des bétons innovants de renommée internationale.

En 2014, le chiffre d'affaires de Lafarge s'est élevé à 12,843 milliards d'euros, dont 66,5 % dans le ciment et 33,1 % dans le béton et les granulats. Présent dans 61 pays, le groupe emploie environ 63 000 personnes sur 1 612 sites de production.

Le 10 juillet 2015, Lafarge fusionne avec le suisse Holcim. Le nouveau groupe est officiellement lancé le 15 juillet 2015 sous le nom de LafargeHolcim"

 

Source Wikipédia

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2 avril 2016 6 02 /04 /avril /2016 10:04
Loi Travail : 3 salariés grévistes menacés de licenciement dans le Nord

Le patronat en rêve : revenir aux conditions du XIXème siècle, aux temps rêvés des patrons quand la grève était encore interdite.  Un patron du Nord l'a fait : il a interdit le droit de grève.  Le comportement du gouvernement lui donne des ailes sans doute.  Inspiré par Valls-Hollande et le Medef, il a licencié ses salariés grévistes.  

Le droit de grève ? C'est archaïque.  Ce sont des idées du passé,  les idées de ceux qui restent frileusement accrochés aux droit et code du travail.  N'est-ce pas ce que nous serinent tous nos experts et journalistes ?

Qu'est-ce qu'ils vont dire nos valeureux chiens de garde de cette nouvelle interprétation des libertés collectives ?AC

Histoire et mémoire de classe : Le droit de grève est le fruit d'un long combat

 

Un long chemin vers les libertés collectives à l'entreprise

La loi Le Chapelier, votée en 1791 interdisait le droit de coalition, donc la grève. En mai 1864, une loi rétablit ce droit, autorisant ainsi la grève.

Près de 80 ans plus tard, le droit de grève est de nouveau interdit, par le gouvernement de Vichy qui prône la collaboration de classe érigée en loi dans la « Charte du travail ». Pendant la longue période d'occupation nazie, la classe ouvrière fournit une part importante des combattants de la résistance. Parmi eux, un grand nombre de militants de la CGT et du Parti communiste français. Un grand nombre de fusillés et de déportés aussi.  Les rues de nos villes en témoignent.  Beaucoup portent le nom de ces martyrs.

 

Le droit de grève est un droit constitutionnel

A la Libération, une nouvelle constitution est débattue et votée. L’avènement de la Quatrième République transforme le droit du travail en France. Désormais, par leur inscription dans le préambule de la constitution de 1946, certains droits et libertés deviennent constitutionnels. Le texte affirme ainsi que « Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son choix. », instaure le droit de grève et l’interdiction de la discrimination au travail. Il s’engage aussi sur le respect du droit international. L’attachement à ce préambule et à la déclaration universelle des droits de l’homme sera réaffirmé dans la constitution de 1958.AC

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1 avril 2016 5 01 /04 /avril /2016 21:21
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1 avril 2016 5 01 /04 /avril /2016 14:00

Mis en ligne le 31 mars à 16 heures.

Pendant que la Fédération socialiste de Seine-Maritime signe, ce 31 mars, un texte intitulé « Bruxelles, face à l'horreur: rester solidaires ! », les salariés et les jeunes attaqués par le gouvernement socialiste défilent dans les rues de Rouen. Quand la manifestation emprunte les quais et les ponts de Rouen, c'est sur trois ponts qu'elle se déploie. Du rarement vu. Bien plus que le 9 mars, que le 17 et 24 mars. A la fin de la manifestation les responsables syndicaux annoncent 25000 personnes. Les lycéens et étudiants sont plusieurs milliers. Ils ont décidé de prendre la tête du cortège. « Ni amendable, ni négociable, Retrait de la loi Travail »,«  Tout ce qu'ils ont, ils l'ont volé », « Salariés licenciés, Goodyear condamnés, ça va péter », les slogans sont repris par les manifestants. Ces derniers n'ont vraiment pas envie de s'arrêter là. Les portuaires sont là, ceux d'Aérazur, de Sanofi et Basf, les hospitaliers, l'énergie, les Leclerc d'Elbeuf, les Carrefour Market, des territoriaux. Les drapeaux syndicaux fleurissent : beaucoup de CGT, des Solidaires et des FO. Dans le cortège des jeunes on voit l'UNL, l'UNEF, les jeunes communistes …

Les responsables sont dénoncés avec force : le Medef, le gouvernement socialiste. Mais curieusement quasiment personne ne dénonce l'Union Européenne alors que c'est la commission puis le conseil européens qui ont rédigé, en mai puis juillet 2015, les recommandations dont le pouvoir socialiste s'est directement inspiré pour rédiger son texte de judas.

Mais comme dans d'autres villes, pour le gouvernement socialiste, la meilleure des parades c'est la provocation. Alors que jamais les CRS ne sont jamais devant la préfecture, ils attendent. Et dès que les jeunes approchent, c'est l'affrontement et les gaz lacrymogènes. Les manifestants ne peuvent atteindre la préfecture. Qu'importe. La prise de parole se fera un peu plus loin. Et l'appel à renforcer la lutte, à débattre dans les entreprises pour faire grandir le rapport de forces est lancé. A ceux qui se sont mobilisés aujourd'hui de discuter, d'entraîner. Pour être encore plus nombreux la prochaine fois. Une réunion intersyndicale a lieu ce soir.

25000 dans les rues de ROUEN pour réclamer le retrait de la loi Travail
Manifestation du 31 mars 2016
Manifestation du 31 mars 2016
Manifestation du 31 mars 2016
Manifestation du 31 mars 2016
Manifestation du 31 mars 2016
Manifestation du 31 mars 2016
Manifestation du 31 mars 2016
Manifestation du 31 mars 2016
Manifestation du 31 mars 2016
Manifestation du 31 mars 2016
Manifestation du 31 mars 2016
Manifestation du 31 mars 2016

Manifestation du 31 mars 2016

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