Article AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/
Nous avions relayé l'appel à la grève lancé par le principal syndicat des cheminots de Belgique, pour ce 30 juin. L'appel à la grève a été massivement suivi contre les conséquences de la casse de la SNCB.
Le mouvement des cheminots belges, lancé à l'appel du seul syndicat CGSP (affilié à la FGTB, de tradition socialiste), a paralysé le pays, du dimanche 29 juin 22 h jusqu'au lundi 30 juin 22 h, une infime partie des trains circulait en Wallonie, Flandres et à Bruxelles.
Aucun train en Wallonie et à Bruxelles, le trafic international perturbé
Selon les données de la SNCB, à peine 20 % des trains circulaient en Belgique pendant cette journée de mobilisation.
La mobilisation a toutefois été fortement différenciée selon les grandes régions : aucun train ne circulait en Wallonie comme à Bruxelles, tandis qu'en Flandres, selon les lignes un train sur trois ou deux trains sur trois étaient opérationnels sur le réseau ferré.
La grève a également fortement perturbé le trafic international, puisqu'aucun Thalys n'a traversé le territoire belge le 30 juin selon la communication de la société Thalys, tandis que les Eurostar en provenance et à destination de Bruxelles finissaient leur trajet en gare de Lille.
Le trafic dans le petit Etat du Luxembourg a également été fortement perturbée par l'action des travailleurs du rail de Belgique, à en croire les compte-rendus de la presse du Grand-duché.
Une grève contre les effets des « réformes ferroviaires » et la casse de la SNCB
Le syndicat CGSP a d'abord lancé ce mouvement de grève pour protester contre les plans de réduction des effectifs – encore de 500 à 1 000 salariés cette année – ainsi que contre l'accumulation d'1 million de « jours de repos » non accordés par la SNCB, soit 36 jours de congé par cheminot !
Plus largement, c'est la casse de la SNCB en 2005 par une « réforme ferroviaire » qui est en cause. La SNCB était alors scindée en trois entités – Infrabel pour l'infrastructure, SNCB pour l'opérateur, SNCB-Holding pour gérer l'ensemble.
En 2014, l'holding de tête a été supprimé, révélant le but véritable : séparer nettement le gestionnaire de l'infrastructure (public) de l'opérateur (privatisable) pour faciliter la mise en concurrence du transport de voyageurs intérieur.
Ce fut le prélude au plan de suppression des effectifs, au développement des emplois non-statutaires, à la floraison de « filiales » semi-privatisées dans des branches du rail (logistique, fret, informatique), à la dégradation de la qualité du service.
Devant l'ampleur de cette mobilisation, la CGSP – connue historiquement pour ses positions réformistes, en dépit de bases combatives, notamment en Wallonie – a calmé le jeu, espérant que « la direction de la SNCB a bien compris le message ».
Elle a également regretté d'être contrainte d'aller à la grève, gênant les usagers et pénalisant les salariés, préférant le terrain de la négociation.
Toutefois, la CGSP a franchi le pas de la grève, entraînant derrière elle la quasi-totalité des salariés du rail. Les deux autres centrales, la CSC-Transcom (de tradition chrétienne), la SLFP-Cheminots (de tradition libérale), ont elles refusé de prendre part à la grève.
Ces deux fédérations ne souhaitent pas rompre le « dialogue social » pourtant stérile, ne conduisant qu'à entériner la casse ultérieure de la SNCB, la dégradation des conditions de travail des cheminots ainsi que de la qualité du service.
L'absence de convergence de lutte des cheminots d'Europe : la CES en cause
Dix jours après la fin du mouvement massivement suivi des cheminots français, alors qu'en Allemagne, les cheminots sont prêts à aller au conflit, qu'en Suède les travailleurs du secteur avaient suivi une grève historique contre les opérateurs privés du type Veolia, une question se pose :
Que fait la CES (Confédération européenne des syndicats) si prompte à demander la constitution d'un « syndicalisme européen », d' « euro-manifestations », si ouvertement absente quand il s'agit de faire converger les luttes concrètes qui se font jour en Europe ?
Son véritable agenda se révèle dans ces moments de vérité, elle qui n'a pas adressé de message public de solidarité aux grévistes des différents pays : sous la direction de la française (qui n'a jamais milité dans un syndicat français !) Bernadette Ségol, ses objectifs sont tout autres.
Le programme officiel de la CES est bien de favoriser le « dialogue social » entre employeurs et salariés, d’œuvrer pour la « construction d'une Europe unie, avec une dimension sociale », faisant de l'Europe une « région prospère et compétitive ».
La CES regroupe en Belgique les syndicats socialistes comme la FGTB, démocrates-chrétiens comme la CSC et libéraux tel la CGSLB. Pour la grève du 30, cela veut dire que deux des trois syndicats de la CES ont refusé la grève.
Le silence de la CES se comprend mieux tant celle-ci voit ses affiliés des deux côtés du piquet de grève, tant elle ne trouve de cohérence que lorsque toutes les confédérations-membres sont réunies à la table de négociation avec le patron.
En France, la CES unit la CGT, la FSU mais aussi FO, l'UNSA, la CFDT ou la CFTC.
Au vu des dernières luttes en France, en particulier celle des cheminots, on peut se demander comment une organisation internationale peut donner une perspective commune à ces syndicats issus de traditions si différentes …
… à moins que l'objectif de la CES, clairement assumé, soit justement d'uniformiser tous les syndicats, d'aseptiser les confédérations sur des positions de lutte de classe, de les aplanir sur des positions de conciliation sociale, favorables à la construction d'une Europe unie pour le capital.
La lutte de nos camarades belges est source d'espoir pour une rentrée des luttes en France, en Europe, dont les cheminots pourraient encore être le moteur … même s'il ne faudra pas compter sur la CES pour l'organiser !
Article sur les luttes des cheminots en Europe :
En Grande-Bretagne : http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/article-ou-nous-mene-la-reforme-ferroviaire-retour-sur-les-effets-desastreux-de-la-privatisation-du-rail-bri-123882482.html
En Allemagne : Les conducteurs de train allemands prêts à aller au conflit avec la direction de la Deutsche Bahn pour la semaine de 37 h