Rappelons l'article publié par "canempechepasnicolas" en octobre 2012 et ce que faisaient hier les farouches partisans d'"ingérence humanitaire" aujourd'hui.
Depuis de nombreuses semaines, le pouvoir, les médias* et l’ensemble de la classe politique s’en prennent directement à la Syrie et son président, les accusant de tyranniser leur peuple
Pas un jour ne se passe sans que Damas ne soit montré du doigt : il ferait « quotidiennement couler le sang des manifestants » qui « courageusement », affronteraient les militaires et les policiers, pour montrer leur opposition au régime.
Cette offensive française s’insère dans une campagne menée par les forces impérialistes contre un Etat qui refuse de s’incliner devant les intérêts des Etats-Unis et de leurs compères occidentaux de l’Otan.
La France officielle, droite et «gauche» rassemblées, crie le plus fort de la meute.
Et pourtant !
Le contentieux entre nos deux pays devrait, au contraire, porter « à repentance »…
En effet, comment ne pas évoquer les Croisades, ces siècles, de 1095 à 1270, où les « Européens », Francs et Germains, commandités par le Pape, se ruaient en « Terre sainte », en terre aujourd'hui syrienne, avec comme prétexte l'objectif de « libérer le tombeau du Christ » de la domination des « infidèles », les Arabes.
Urbain II avait appelé les chrétiens d'Occident à cesser de se faire la guerre et à s'unir pour combattre les "païens" et « délivrer les frères d'Orient ».
Et de massacrer au passage des dizaines de milliers de juifs, comme impies.
Et cette terre-là, où fut portée la guerre, c’était, en partie, la Syrie d’aujourd’hui.
Mais le temps qui passe noie les souvenirs et assèche les torrents de sang répandu.
Aussi, faisons avec l’histoire un bond de plus de six siècles.
Nous sommes en 1919. Les Alliés ont gagné la guerre. Français et Anglais se partagent l’ancien empire turc, associé à l’Allemagne vaincue.
Lloyd Georges et Clemenceau, chefs des gouvernements britannique et français, s'accordent, en marge de la Conférence de Paix de Versailles, Clemenceau a lâché la région de Mossoul riche en pétrole et les Britanniques ont accepté le protectorat français sur le reste de la Syrie.
Le général Henri Gouraud, véritable “proconsul” français de 1919 à 1923, marche alors sur Damas où règne le roi Fayçal. Gouraud fut l’un des artisans les plus furieux du dépeçage de la Syrie, dont le plus gros morceau arraché est le Liban. (Conférence de San Remo,1920)
Le « mandat » français donné par la SDN sur ces territoires, ne fut qu’une colonisation déguisée, que le peuple syrien n’a jamais, accepté.
Aux révoltes multiples, (celle de 1924-1926, entre autres), succèdent des répressions sauvages.
C’est ainsi qu’en 1945, le lendemain de l’armistice de la 2° guerre mondiale, la France, fraîchement libérée, tirait encore au canon sur la population de Damas : **
Mais la Syrie et le Liban deviennent, formellement, indépendants, les premières colonies à sortir du carcan de « l’Empire français ».
La France laisse de plus, derrière elle, un Liban, volontairement atomisé en diverses communautés religieuses, qui se disputeront le pouvoir, au prix de sanglantes guerres civiles.
Le rôle joué, jadis, par la France en Syrie et au Liban, devrait la conduire à une importante retenue dans la situation présente.
Comme chacun le sait, il n’en est rien.
Au contraire, son interventionnisme ouvert contre le pouvoir syrien a le doux parfum d’un esprit colonial, à fins impérialistes, à peine déguisé.
Comme en Côte d’Ivoire et en Libye.
* L’éditorial du Monde, daté du 26 juillet 2012, a pour titre :
« Les Syriens méritent qu’on ne les oublie pas ».
Il se termine ainsi :
« Les Etats-Unis et l’Europe devraient aider une opposition syrienne disparate et divisée à s’organiser. Ils devraient lui assurer un soutien politique et économique ».
Peut-on, plus outrageusement, plaider le droit d’ingérence dans un pays souverain ?
** « Le 29 mai 1945, après dix jours de manifestations ininterrompues, les Français, sous l’ordre du général Oliva-Roget bombardent Damas pendant 36 heures d’affilée. Les morts et les blessés se comptent par centaines. Une partie de la ville est détruite par ce bombardement, dont le parlement syrien. »