Un film “grand public » qui met en lumière à la fois le désastre budgétaire de notre hôpital public et les violences policières contre le mouvement des Gilets jaunes ne pouvait qu’attirer notre attention (attention : spoiler). Politiquement d’abord car chez Frustration, la casse du service public est documentée régulièrement et nous avons apporté un soutien indéfectible aux Gilets jaunes dès le départ, encore aujourd’hui. Et sentimentalement, les membres de ma famille travaillant pour l’essentiel comme aides-soignants et brancardiers depuis de nombreuses années, dont certains ont également été Gilets jaunes. La Fracture (2021), réalisé par Catherine Corsini, capte la période de l’hiver 2018 – 2019 où les manifestants, en particulier à Paris, lieu de concentration des pouvoirs comme au VIIIe arrondissement, subissent un sérieux pic de violences policières. La Fracture, c’est celle du Gilet jaune Yann (Pio Marmaï), qui se prend une grenade à la jambe lors d’une manifestation, et aussi celle de la dessinatrice un peu bourgeoise Raf (Valeria Bruni-Tedeschi), qui n’a rien à voir avec ce mouvement mais qui s’évanouit et se pète le bras dans Paris où elle vit à cause de sa copine Julie (Marina Foïs) qui ne veut définitivement plus d’elle. Ils se retrouvent dans les urgences d’un hôpital public qui, devinez quoi, est lui aussi en crise et fracturé.
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"Avec ces scènes, la réalisatrice cherche à faire transparaître le manque de personnel à l’hôpital, mais sans aucune finalité politique : c’est dû à qui et à quoi, tout ça ?"
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Bref, vous l’aurez compris : La Fracture, elle est physique, elle est sociale, elle est multiple, elle est douloureuse, elle est ceci, cela. Une société “fracturée”, c’est le thème social-démocrate par excellence : c’est considérer qu’elle pouvait être “unie”, par le passé, mais qu’elle est victime d’un mauvais sort social dont on ignore la provenance. Or, une société capitaliste est intrinsèquement inégalitaire, depuis ses origines, en se basant sur une société de classes dont l’une est au service de l’autre. La lutte de classes, chez Catherine Corsini, n’existe pas. Un comble pour un film qui traite à la fois de l’hôpital public et des Gilets jaunes.
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"Une société “fracturée”, c’est le thème social-démocrate par excellence : c’est considérer qu’elle pouvait être “unie”, par le passé, mais qu’elle est victime d’un mauvais sort social dont on ignore la provenance."
La rage passée et qui pouvait se manifester de temps en temps pendant le film (le plaisir de revoir des images de manifestations, la solidarité soignants/manifestants) se transforme en une forme de fatalité démobilisatrice.
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