Basta ! : Votre documentaire s’intitule Les sentinelles. Pourquoi ?
Pierre Pézérat : Quand le flocage d’amiante a commencé à tomber à Jussieu, et que des chercheurs ont été atteints de maladies, Henri Pézerat a aussitôt pensé aux ouvriers qui avaient été en contact permanent avec cet amiante, se disant qu’ayant été davantage exposés que les chercheurs, ils devaient avoir développé encore plus de maladies, et sans doute plus gravement. C’est ainsi que la mobilisation contre l’amiante a pu prendre de l’ampleur et mener à son interdiction.
Les ouvriers sont des sentinelles du milieu environnemental : à chaque fois qu’il y a un empoisonnement derrière un poste de travail, on peut être sûr que quelques années plus tard, il y en aura parmi le reste de la population. Le dossier des pesticides l’illustre très bien. Les maladies professionnelles donnent l’alerte d’un empoisonnement bien plus large. Raison de plus pour aller déterrer les atteintes à la santé qui restent cachées dans le monde du travail.