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ACTION COMMUNISTE

 

Nous sommes un mouvement communiste au sens marxiste du terme. Avec ce que cela implique en matière de positions de classe et d'exigences de démocratie vraie. Nous nous inscrivons donc dans les luttes anti-capitalistes et relayons les idées dont elles sont porteuses. Ainsi, nous n'acceptons pas les combinaisont politiciennes venues d'en-haut. Et, très favorables aux coopérations internationales, nous nous opposons résolument à toute constitution européenne.

Nous contacter : action.communiste76@orange.fr>

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Humeur

Chaque semaine, AC attribue un "roquet d'or" à un journaliste qui n'aura pas honoré son métier, que ce soit par sa complaisance politique envers les forces de l'argent, son agressivité corporatiste, son inculture, ou sa bêtise, ou les quatre à la fois.

Cette semaine, sur le conseil avisé de la section bruxelloise d'Action communiste, le Roquet d'Or est attribué  à Thierry Steiner pour la vulgarité insultante de son commentaire sur les réductions d'effectifs chez Renault : "Renault fait la vidange"...  (lors du 7-10 du 25 juillet).


Vos avis et propositions de nominations sont les bienvenus, tant la tâche est immense... [Toujours préciser la date, le titre de l'émission et le nom du lauréat éventuel].

 

 
8 mars 2018 4 08 /03 /mars /2018 00:13
En Russie, du 8 mars au 13 mars 1917, la « révolution de Février »
Serge Wolikow Historien
Vendredi, 24 Février, 2017
L'Humanité
Manifestation aux chantiers Putilov à Petrograd, février 1917. Rue des archives/BCA

Le processus révolutionnaire qui, au cours de l’année 1917, met à bas l’Empire russe et l’ordre politique et social ancien, commence au début de l’année du calendrier julien par des journées révolutionnaires qui se déroulent à Petrograd.

Les cinq jours qui inaugurent la vague révolutionnaire russe sont décisifs car ils révèlent une dynamique et un déroulement qui surprennent les acteurs eux-mêmes. Cette première phase révolutionnaire a longtemps été reléguée au second plan au motif qu’elle inaugurait une révolution bourgeoise au terme de laquelle les acteurs de la geste révolutionnaire auraient été dépossédés du pouvoir avant de le récupérer à la fin de l’année. En fait, les premiers jours de la révolution sont fondateurs d’une situation politique nouvelle dont la soudaineté a surpris les contemporains par son rythme, son ampleur et ses modalités.

La fin de l’Empire russe est scellée en quelques jours dans un espace réduit puisque les événements se passent pour l’essentiel dans la capitale. Les principaux acteurs, les ouvrières et les ouvriers des grandes usines, les soldats de la garnison, les militants clandestins comme les hommes politiques de l’assemblée, la Douma, sont les uns et les autres confrontés à une situation engendrée par la guerre. L’annonce des mesures de rationnement qui déclenche les premières protestations et manifestations de masse comme ensuite le basculement des soldats du côté des manifestants est indissociable des effets produits par la guerre dans laquelle le pays est plongé depuis l’été 1914.

Si l’événement révolutionnaire surgit de façon inattendue au début de 1917, il puise ses origines dans un profond malaise social et politique que la guerre catalyse. Le régime autocratique russe entré dans la guerre avec l’ambition de renforcer son assise va au contraire se révéler rapidement incapable de faire face. La guerre fait apparaître les faiblesses de l’économie russe tant du côté de l’industrie que des transports. La raréfaction des produits de consommation jointe à l’énorme ponction faite par la mobilisation sur la paysannerie entraîne des pénuries alimentaires et des problèmes de ravitaillement. Les défaites militaires dès 1915, aggravées par la perte massive de territoires en 1916, sapent le prestige d’une monarchie dont la figure du tsar et de sa famille se dégrade. L’armée est traversée par des divisions profondes, d’un côté l’état-major et le corps des officiers, pour l’essentiel appartenant à la noblesse, de l’autre les soldats issus du monde paysan. Entre eux le fossé s’aggrave à l’occasion des défaites, du manque d’armement, des pertes massives que subissent les armées russes. L’opposition politique est fortement divisée, les forces libérales qui dominent la Douma et critiquent justement le régime impérial pour son incurie et l’incapacité de la cour à faire face aux problèmes suscités par la prolongation de la guerre sont en même temps méfiantes et hostiles aux partis socialistes, eux-mêmes divisés sur l’attitude à l’égard de la guerre et la manière de lutter contre un pouvoir dont les forces de répression constituées par la police et les troupes spéciales, les cosaques, inspirent une crainte fondée sur les actions meurtrières qu’elles ont menées depuis 1905.

Les régiments mutinés font allégeance au soviet, qui a la réalité du pouvoir

Au début de 1917, les difficultés du réseau ferroviaire, aggravées par le froid intense, pèsent sur le ravitaillement alimentaire de Petrograd, les usines tournent au ralenti. Les premières manifestations sont celles des femmes, en résonance avec la Journée internationale du mouvement socialiste, le 23 février. Portées par l’exaspération des interminables queues devant les boulangeries, elles sont des milliers à se rendre dans le centre de la ville. Les jours suivants, contre toute attente, les manifestations gagnent en ampleur, les ouvriers dans la plupart des usines ont voté la grève et convergent vers le cœur de Petrograd, franchissant à pied la Neva gelée en déjouant les barrages de la police et les cosaques. En quelques jours, la situation bascule, face à la population ouvrière, aux étudiants qui manifestent bientôt par dizaines puis centaines de milliers, les soldats reçoivent des ordres contradictoires. Le tsar, éloigné de la capitale, transmet à l’état-major sa décision de ramener l’ordre en faisant donner la troupe. Ici ou là les officiers ordonnent à leurs soldats de tirer sur la foule, il y a des dizaines de morts.

Bientôt, cependant, une partie des soldats refusent d’obéir à ces consignes, d’autant que la foule les appelle à se joindre aux manifestants. Les casernes de la garnison, le 28, se sont retournées contre les officiers, dont bon nombre subissent un châtiment expéditif. Contrairement à une légende forgée par les libéraux quelques mois plus tard, la révolution de Février a été marquée par la violence de la répression mais aussi celle des soldats insurgés. Dès le 28 février, se forme un comité de soldats et d’ouvriers (soviet) où les militants des différents courants socialistes s’affirment. Les régiments mutinés font allégeance au soviet, qui a la réalité du pouvoir. Pour autant, paradoxe de cette révolution populaire d’ouvriers et de soldats, c’est un comité constitué par les députés de la Douma qui se transforme en gouvernement provisoire. Ces députés libéraux des partis bourgeois progressistes, qui avaient jusqu’au 1er mars hésité à s’élever contre l’autorité du tsar, vont se rallier à la République lorsque Nicolas II abdique et que la revendication républicaine est portée par le mouvement populaire. Le soviet de Petrograd, par son appel du 1er mars, met à bas l’armée tsariste et affirme le droit des soldats.

L’effondrement du régime, de ses symboles comme de ses institutions s’effectue en quelques jours, à travers toute la Russie. Partie des villes, la révolution gagne les campagnes et balaye l’ancien système. En France, l’Humanité, après plusieurs jours d’expectative, titre, le 15 mars : « La révolution triomphe en Russie, l’ancien régime s’écroule sous la poussée de toutes les forces nationales ». Le gouvernement provisoire annonce le développement des libertés et des réformes, l’élection d’une Assemblée constituante. Mais l’existence d’un système de deux pouvoirs, la remise à plus tard de la question de la guerre et de la terre à la base des aspirations populaires expriment les contradictions qui traversent un processus révolutionnaire inachevé qui rebondira les mois suivants.

Quelques livres pour aller plus loin : les Révolutions russes, de Nicolas Werth. Éditions PUF, « Que sais-je ? ». La Révolution russe, t. 1, d’Orlando Figes. Éditions Gallimard, « Folio Histoire ». La Révolution russe de 1917, de Marc Ferro. Éditions Flammarion.
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