Texte de l'allocution de Marx au meeting londonien sur la Pologne, Deutsche-Brüsseler-Zeitung
Cf. : "Engels, compte-rendu du meeting de Londres sur la Pologne..." http://merlerene.canalblog.com/archives/2015/09/05/32247116.html
Voici le texte de l'intervention de Marx au meeting londonien du 29 novembre 1847, tel que le publie le journal bihebdomadaire bruxellois de Marx le 9 décembre 1847. (Son lectorat germanophone mêle radicaux, socialistes et communistes.)
On peut consulter plusieurs traductions. Je donne ici celle de Maximilien Rubel.
"L’entente et la fraternité des nations est une phrase que tous les partis ont à la bouche aujourd’hui, notamment les libre-échangistes bourgeois. Il existe en effet une sorte de fraternité parmi les classes bourgeoises de toutes les nations : c’est la fraternité des oppresseurs contre les opprimés, des exploiteurs contre les exploités. De même que la classe bourgeoise d’un pays est fraternellement unie contre le prolétariat du même pays, malgré la concurrence et la lutte des membres de la bourgeoisie entre eux, de même les bourgeois de tous les pays sont fraternellement unis contre les prolétaires de tous les pays malgré leur rivalité et leur concurrence sur le marché mondial. Pour que les peuples puissent vraiment s’unir, il faut que leurs intérêts soient communs, il faut abolir les conditions actuelles de propriété, car elles impliquent l’exploitation des peuples entre eux. Seule la classe ouvrière a intérêt à abolir le régime actuel de la propriété. La classe ouvrière est d’ailleurs la seule à avoir les moyens de le faire. La victoire du prolétariat contre la bourgeoisie est en même temps la victoire sur les conflits nationaux et industriels qui dressent de nos jours les différents peuples les uns contre les autres. Aussi la victoire du prolétariat contre la bourgeoisie sera-t-elle le signal de la libération de tous les peuples opprimés.
L’ancienne Pologne est certes perdue et nous serions les derniers à souhaiter son rétablissement. Mais l’ancienne Pologne n’est pas la seule à être perdue. La vieille Allemagne, la vieille France, la vieille Angleterre, toute l’ancienne société est perdue. Mais la perte de l’ancienne société n’est pas une perte pour ceux qui n’ont rien à perdre dans l’ancienne société, et dans tous les pays, c’est le cas pour la grande majorité des hommes. Bien au contraire, ils ont tout à gagner à la disparition de l’ancienne société, qui entraîne la création d’une société nouvelle non plus fondée sur l’antagonisme des classes. De tous les pays du monde l’Angleterre est celui où l’antagonisme entre le prolétariat et la bourgeoisie est le plus développé. La victoire du prolétariat anglais sur la bourgeoisie anglaise est, par conséquent, décisive pour la victoire de tous les opprimés contre leurs oppresseurs. Il en résulte que ce n’est pas en Pologne que la Pologne doit être libérée, mais en Angleterre. Et vous, chartistes, vous n’avez pas à exprimer de pieux souhaits pour la libération des nations. Battez vos propres ennemis de l’intérieur et vous pourrez avoir la fière conscience d’avoir battu toute l’ancienne société."
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